• Le poète grec Οδυσσέας Ελύτης – OΔΥΣΣΕΑΣ ΕΛΥΤΗΣ disait :

    « Αν αποσυνθέσεις την Ελλάδα, στο τέλος θα δεις να σου απομένουν μια ελιά, ένα αμπέλι κι ένα καράβι. Που σημαίνει : με άλλα τόσα την ξαναφτιάχνεις. » Οδυσσέας Ελύτης

    « Si tu déconstruis la Grèce, tu verras à la fin qu'il te reste un olivier, un vignoble et un bateau. Ce qui signifie : avec tant d'autres, tu [peux] la reconstruire. » Odysseas Elytis

     

    D'après le poète, l'olivier est l'une des trois composantes essentielles de l'identité grecque.

    Voici l'arbre en compagnie d'un autre emblème, qui relève de la mer :

     

    La route de l'olivier

     

    Nous sommes à Πόρος – ΠΟΡΟΣ, à l'Est de la baie qui sépare l'île du continent.

    En surplomb, l'olivier veillait sur les bateaux qui se trouvaient en contrebas.

    L'arbre jouait le rôle de sentinelle. Le séjour paisible des nefs dépendait de sa vigilance et de son dévouement.

    Surgissant de la roche, l'olivier qui disputait aux conifères cet emplacement stratégique, était comme un ange gardien.

    La position de l'ange gardien a inspiré ce vers de Giovanni Pascoli :

    « Tra i massi s’avvinchia, e non cede. »

    Parmi les rochers, il s'accroche, et ne cède pas.

    Nous avons croisé le bel ange gardien en nous rendant à l'église dédiée aux Saints Ανάργυροι – AΝΑΡΓΥΡΟΙ.

     

    Du côté du soleil levant, la terrasse du sanctuaire offrait le panorama suivant :

     

    La route de l'olivier

     

    C'était par ce chenal que nous sommes entrés pour la première fois dans la baie de Πόρος – ΠΟΡΟΣ. Nous venions d’Ερμιόνη – ΕΡΜΙΟΝΗ, qui se trouvait derrière le promontoire qui se dessinait à l’horizon.

    Nous nous dirigions vers l'entrée qui se trouvait au pied des cyprès. Mais les cyprès n'étaient pas seuls. À côté d'eux, veillaient aussi des oliviers, reconnaissables à leur feuillage argenté.

    Ces oliviers se sont installés aux avant-postes pour souhaiter la bienvenue au visiteur.

    Au Zeph inquiet à cause des restrictions déclenchées par la pandémie, ils annonçaient la proximité et la disponibilité d'un havre de paix et de bonheur.

    En effet, une fois amarré au quai municipal de Πόρος – ΠΟΡΟΣ, le Zeph a passé des journées très agréables et édifiantes, grâce à l'extrême richesse du patrimoine culturel du lieu.

    La présence in situ permettait d’apprécier la beauté de l'île à des heures privilégiées.

    La balade dans la « Baie des Russes » était l’une des plus mémorables.

    Voici une vue de cette baie, qui a été témoin d’événements tragiques au lendemain de l’Indépendance acquise par la Grèce :

     

    La route de l'olivier

     

    Le cadre était enchanteur. La nature charmait par son aspect sauvage. Tout semblait paisible.

    Au premier plan, des oliviers côtoyaient des asphodèles.

    Les oliviers officiaient en tant que sentinelles de la paix.

    Et les asphodèles ?

    L’Antiquité leur attribuait un voisinage avec le monde des Enfers.

    La proximité entre les deux catégories de plantes était-elle seulement fortuite dans ce panorama de la « Baie des Russes » ?

    Pas du tout pour qui se penche sur la naissance de la Grèce moderne.

    La « Baie des Russes » évoquait la lutte fratricide entre le Gouverneur de la Grèce récemment indépendante, qui était Kapodistrias, et le Navarque Miaoulis, qui avait participé à tous les combats navals contre l’envahisseur ottoman, et que certains n’hésitaient pas à comparer à Thémistocle, le vainqueur de Salamine.

    Le premier homme était soutenu par le « Parti Russe ». Le second, par le camp des Britanniques.

    Le Navarque, très réticent à la tutelle russe, a fait couler dans ces eaux, le vaisseau amiral Ελλάς – EΛΛΑΣ et la corvette Ύδρα – ΎΔΡΑ, qui appartenaient pourtant à la nation grecque.

    Miaoulis, l’insoumis, ne voulait pas que ces deux navires emblématiques tombent entre les mains des Russes, qui commençaient à faire la loi à Πόρος – ΠΟΡΟΣ.

    Événement tragique. Souvenir douloureux. Cicatrice encore béante.

    Il est alors licite de voir dans le profil faussement innocent des asphodèles les colonnes de fumée qui se sont élevées quand les deux principaux vaisseaux de la marine nationale grecque sombraient dans les flots.

    Dans ce contexte du déchirement, quelle serait la signification de la présence des oliviers tout proches ?

    Ceux-ci parlaient du désir de concorde nationale, qui dépendait de la volonté de pardonner de la part des uns et des autres.

    La route de l’olivier est celle qui mène vers l’harmonie, et qui est pavée de clémence.

    Un peu plus loin, en allant vers la sortie Ouest de la baie, voici un autre panorama :

     

    La route de l'olivier

     

    Que des oliviers, dont plusieurs se regroupaient pour former une gigantesque boule sphérique aux reflets argentés.

    Nous sommes toujours dans la « Baie des Russes ». Mais cette fois-ci, la vision est celle de la convergence des efforts. L’harmonie est retrouvée. La prospérité est au bout de la route du pardon.

    Autre vision encourageante :

     

    La route de l'olivier

     

    L’arbre n’est pas stérile.

    Nous sommes encore dans la « Baie des Russes ».

    L’olivier porte ses fruits, prémices de douceur.

    La route de l’olivier est celle de la fécondité et de la guérison.

    L’harmonie se dirige vers son plein accomplissement parce qu’elle est persévérante.

    L’olivier incarne la victoire dans la durée, un défi de longévité.

    Voici une vision qui montre que l’olivier détient la fontaine de jouvence :

     

    La route de l'olivier

     

    Du tronc coupé à hauteur d’homme, ont surgi de nouvelles branches, avec leur fascinante vitalité. Comme si la coupure était un affront qu’il fallait vite réparer.

    La résurgence est phénoménale, pour signifier que le désir de paix est inextinguible.

    La plage se trouvait sur la route qui menait du centre de Πόρος – ΠΟΡΟΣ jusqu’à la « Baie des Russes ». L’olivier régénéré était-il à sa place sur cette plage ?

    L’arbre au feuillage argenté était tout à fait à sa place, en tant que sentinelle de la paix.

    Une paix qui permet à la nouvelle génération de se parer du charme de l’insouciance.

    La route de l'olivier est une promenade au milieu d'une éternelle renaissance.

    À Καλαμάτα – KAΛΑΜΑΤΑ aussi, l’extraordinaire force de vie de l’olivier nous a subjugués. Voici ce que nous avons vu à un croisement, en allant faire nos courses :

     

    La route de l'olivier

     

    Le tronc coupé n’a pas cédé au découragement. Au contraire, il a dynamisé sa sève et a produit plusieurs rameaux qui témoignaient de son éternelle jeunesse.

    L’espoir multipliait les nouvelles pousses et repartait à la conquête de l’azur.

    L’insolite était dans le cadre de cette résurgence.

    L’olivier invincible se tenait à un croisement. La fonction de sentinelle était donc clairement affirmée.

    À proximité, un énorme camion faisait des livraisons à un supermarché. Le camion s’appelait « Titanic » et affichait sur une portière l’image du célèbre paquebot. Comme le contraste entre la frêle silhouette des jeunes pousses et le gigantisme dont se réclamait le véhicule était saisissant ! Plus saisissante encore était la différence entre les espérances de vie évoquées : le Titanic, qui « parrainait » le camion de livraison a sombré dans l’Atlantique au cinquième jour de la traversée inaugurale tandis que l’olivier qui s’est régénéré continuerait à le faire pendant de nombreuses années encore.

    Ce contraste impressionnant était exhibé dans une rue qui s’appelait ΟΔΟΣ ΗΡΟΔΟΤΟΥ ( en français : RUE D’HÉRODOTE ). Cette rue portait le nom de celui qui était considéré comme « le Père de l’Histoire ».

    Autrement dit, le défi de longévité que l’olivier relevait avec brio devrait être consigné dans les annales. Par sa chronique, le Zeph s’associe à ce devoir de mémoire.

    L’olivier se poste à la croisée des chemins, par prédilection et par vocation.

    Dans la photo suivante, il gardait un autre carrefour :

     

    La route de l'olivier

     

    Nous sommes à Πόρος – ΠΟΡΟΣ.

    L’olivier s’est placé au croisement de deux chemins. L’un d’eux, qui recevait déjà les rayons du soleil, reliait le port à la ville haute. L’autre chemin, encore dans l’ombre, a permis au chasseur d’images d’aller de la gauche de la photo vers la droite, c’est-à-dire de l’Est vers l’Ouest, à flanc de colline.

    La photo a été prise de la terrasse d’un établissement qui proposait couvert et gîte.

    Un ravissant bougainvillier blanc, qui ornait cette terrasse, faisait flotter ses guirlandes nonchalamment.

    L’agent de la paix était une jeune recrue. La silhouette a fait le choix d’être élancée mais le dévouement était énorme. La présence était sympathique. Aucune suspicion, aucune agressivité ne s’en dégageait. Cependant la vigilance était de mise pour garantir la pérennité du calme des lieux.

    Messager de la bonne volonté, héraut de la paix, chantre de la concorde, annonciateur de la prospérité, l’olivier s’acquitte de sa mission en se plaçant aux endroits stratégiques que sont les croisements.

    À ces croisements se rencontrent des chemins qui irriguent le tissu urbain local ou les grandes routes migratoires d'un monde en mutation.

    À Νέα Επίδαυρος – ΝΕΑ ΕΠΙΔΑΥΡΟΣ, l'olivier a marqué avec le sceau de la bonté l'arrivée de migrants en provenance de la péninsule balkanique.

    À Νέα Επίδαυρος – ΝΕΑ ΕΠΙΔΑΥΡΟΣ, un Grec a ouvert son cœur et la porte de son oliveraie à une jeune femme venue d'Albanie. Le Grec s'appelait Aléko et l'élue de son cœur se nommait Maria. Voici Aléko, et derrière lui, Maria, fascinante de pudeur et de discrétion :

     

    La route de l'olivier

     

    Aléko portait une casquette rose. Et Maria, une casquette bleue.

    L'olivier, qui incarne l'hospitalité, est un témoin privilégié de leur amour et de leur soutien mutuel.

    Nous les avons rencontrés quand nous sommes allés visiter le monument qui commémorait l'acte de naissance de la Grèce moderne.

    Aléko se servait d'un râteau électrique, muni d'un long manche, pour faire tomber les olives haut perchées tandis que Maria s'affairait à secouer les branches les plus basses.

    La récolte des olives était une saine activité qui permettait aux deux époux de montrer la convergence de leurs efforts.

    Du champ d'oliviers s'élevait un chant d'amour, si émouvant par sa douceur et son romantisme.

    Avec gratitude, nous nous laissions imprégner par l'harmonie des lieux.

    L'hospitalité à l'ombre des oliviers n'était pas superficielle. En effet, le Grec a insisté pour que nous fassions connaissance avec toute sa famille, particulièrement avec son fils Matéo, qui travaillait dans l'arrière-boutique.

    Nous avons contourné le talus où s'activait la silhouette paternelle et nous nous sommes dirigés vers l'intérieur des terres. Au bout du sentier rocailleux, un jeune homme triait des olives à la main, au-dessus d'une grille métallique destinée à séparer les fruits et les feuilles.

     

    La route de l'olivier

     

    Plusieurs sacs étaient posés à même le sol, sur la gauche de la photo. Ils contenaient les olives récupérées après le tri. En moyenne, chaque sac était rempli avec les fruits de cinq oliviers.

    Grâce à l'exemple maternel, le jeune Grec avait l'attrait de la pudeur. Mais avec la bénédiction de l'arbre de l'hospitalité, un rapprochement irrésistible a eu lieu et nous voilà sur le seuil de la demeure intime de Matéo. Pour notre plus grand bonheur, le jeune Grec est sorti de sa discrétion pour nous demander l'autorisation de nous prendre en photo.

    D'ordinaire, c'est le visiteur qui prend en photo l'hôte qui le reçoit.

    À Νέα Επίδαυρος – ΝΕΑ ΕΠΙΔΑΥΡΟΣ, sous le regard complice des oliviers, c'était l'inverse qui s'est produit.

    Matéo, fils d'une migrante, accueillait à son tour deux migrants venus avec un voilier nommé Zéphyros 2.

    La route de l'olivier est celle de la cordialité entre itinérants.

    L'échange avec Aléko, Maria et Matéo nous a rappelé ces mots de la poétesse Suzy Kassem :

    « Greet each man with words of love and peace, and a dove will be placed on an olive tree...Always choose love. It's time for everybody to speak love. Let's fill the trees with doves, and spread the leaves of love. »

    Saluez chaque homme avec des mots d'amour et de paix, et une colombe sera placée sur un olivier...Choisissez toujours l'amour. Il est temps que tout le monde parle d'amour. Remplissons les arbres de colombes, et répandons les feuilles de l'amour.

     

    L'arbre au feuillage argenté est présent chaque fois que l'enjeu concerne l'entente au sein de la famille humaine.

    En raison de ce lien très étroit entre l'olivier et la concorde, la police hellénique de Πόρος – ΠΟΡΟΣ a choisi le blason suivant :

     

    La route de l'olivier

     

    Un rameau d'olivier occupe le centre de l'écusson. À l'arrière-plan, sont visibles les deux plateaux d'une balance.

    Le premier dessin parle de paix pendant que le deuxième évoque la justice.

    Ainsi, pour les autorités officielles, la paix et la justice sont deux objectifs intimement liés. L'exercice de la justice apporte la paix au sein de la nation. À l'inverse, des conditions de paix facilitent la pratique du jugement équitable.

    Sur le dessin, c'est le rameau d'olivier qui se tient au premier plan. Cette présentation indique que la préservation de la paix est la priorité.

    Autre détail instructif : le rameau central porte des fruits. C'est une allusion à l'efficacité du travail accompli.

    À Πόρος – ΠΟΡΟΣ, trois olives sont reconnaissables à droite de la nervure principale tandis que deux olives sont visibles à gauche.

    La quantité de fruits dessinés à Πόρος – ΠΟΡΟΣ est deux fois plus importante que celle proposée par l'écusson habituellement en usage sur le territoire national.

    Paix entre résidents, entre citoyens.

    Paix entre les ethnies, entre les peuples.

    Paix sociale indispensable à la prospérité économique.

    Il existe une autre prospérité, à laquelle aspire tout être humain, et qui nécessite une paix d'un autre ordre. C'est la prospérité qui s'obtient par la paix avec soi-même et avec la transcendance.

    L'olivier est inséparable de cette quête de paix, qui est la véritable finalité de l'existence.

    La Providence a voulu que les principaux tableaux qui s'y rapportent se trouvent à Αρφαρά – AΡΦΑΡΑ, là où le Mayapi a prévu de faire une longue halte.

    Voici le premier tableau, par le hasard de la visite :

     

    La route de l'olivier

     

    Nous sommes devant l'aire de repos du Mayapi. Les oliviers baignent dans la lumière dorée du coucher de soleil. On pense volontiers au Mont des Oliviers, où un certain Nazaréen s'est rendu, après le repas d'adieu qu'il avait pris en compagnie de ses douze amis intimes.

    Voici le deuxième tableau :

    20200719_102225. Arfara. Olivier et épines

    Le lendemain de notre arrivée à Αρφαρά – AΡΦΑΡΑ, le Mayapi nous a fait visiter son jardin : une immense oliveraie, avec des roseaux et des palmiers, comme au bord du Jourdain.

    Mais ce qui retenait le plus notre attention, c'était la proximité entre certains oliviers et les épines.

     

    La route de l'olivier

     

    Cette proximité rappelait que la promesse de paix ne s'accomplirait pas sans le geste sacrificiel.

    Voici le troisième tableau :

     

    La route de l'olivier

     

    Un insecte vient s'alimenter sur la branche d'épines.

    Celui qui a porté la couronne d'épines fait renaître la vie, grâce au pardon qu'il a obtenu pour l'humanité entière.

    Fantastique scénographie.

    Merveilleuse coïncidence en visitant le jardin du Mayapi.

    Qu'enseigne cette visite d'Αρφαρά – AΡΦΑΡΑ ? Que la route de l'olivier est celle du pardon avant d'être celle de la paix.

    La romancière Mesu Andrews, qui a été récompensée pour son ouvrage intitulé « Love Amid the Ashes » ( l'Amour parmi les Cendres ) a écrit :

    « Forgiveness is like an olive tree. Once it takes root, it will grow, and it's hard to kill. »

    Le pardon est comme un olivier. Une fois qu'il prend racine, il grandit et il est difficile de le tuer.

    La biologie végétale comme archétype de la miséricorde qui guérit chez l'être humain toutes sortes de blessures, même les plus profondes ! Comme c'est fabuleux !

    Précédemment, nous avons parlé de la halte à Αρφαρά – AΡΦΑΡΑ dans l'article « Le refuge de l'ami », publié le 22/07/2020.

    Beaucoup de nos amis s'émeuvent que depuis cinq jours, le Zeph ne frétille plus au milieu des flots, à cause de la mauvaise saison qui commence à s'installer.

    Qu'ils se rassurent !

    Voici une vue du lieu où le Zeph va passer l'hiver :

     

    La route de l'olivier

     

    L'accès au chantier naval, dont les mâts se trouvent au centre de la photo, se fait entre deux immenses orangeraies. Mais un autre arbre dispute à l'oranger la préséance : c'est l'olivier.

    Si l'oranger est prédominant, l'olivier se montre proéminent.

    Cette présence insistante de l'olivier est de bon augure.

    L'hiver que le Zeph passera au chantier Καλυψώ – ΚΑΛΥΨΩ de Γαλατάς – ΓΑΛΑΤΑΣ sera paisible.

    La route de l'olivier est la route de la confiance.

    Thomas Jefferson, troisième président des États-Unis, a déclaré : « The olive tree is surely the richest gift of Heaven. »

    L'olivier est sûrement le plus riche cadeau du Ciel.


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