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Par zéphyros2 le 4 Juin 2020 à 16:26
Il est fier de l’objet de son amour. Il y voit la convergence de la beauté, de la spiritualité et de la bonté.
Il est fier de la manière dont cet amour s’exprime. C’est un amour débordant de vitalité, confiant et inébranlable.
Il est fier d’être un amoureux comblé. Il est fier de son privilège d’aimer et d’être aimé en retour.
Il est fier de faire mentir l’adage : « Loin du cœur, loin des yeux ». Car, pour lui, c’est toujours : « Loin des yeux, mais encore tout près du cœur », avant le Covid, et malgré le Covid.
Le coup de foudre donne du sens à l’existence. Et quand il est permanent, ce qui est le cas, c’est le pied !
L’objet des tendres pensées est là, dès les premières bouffées d’air libre, dès les premiers pas autorisés par le déconfinement. Vite, vite allons retrouver Poséidon, ou plutôt ce qu’il a fait de bien, quand son trident a frappé la roche pour créer de magnifiques îles.
Comment assouvir ce désir quand le Covid a établi une frontière étanche entre l’Hexagone et l’espace grec ?
L’issue est fournie par l’enseignement reçu pendant l’escale à Αργοστόλι – ΑΡΓΟΣΤΟΛΙ. Au Sud-Est de la Marina, se dresse une chaîne montagneuse, qui a pour nom Όρος Αίνος. Nous avons loué une voiture pour explorer ce sanctuaire de la Nature. Et là, au milieu d’un cadre absolument sauvage, Poséidon s’est manifesté à nous d’une manière stupéfiante :
Poséidon est encore appelé ἐνοσίχθων, « l’Ébranleur du sol ».
Le spectacle des énormes souches déterrées et des immenses troncs renversés nous rappelle le souffle furieux qui soulève les vagues en haute mer.
Regardez cette empreinte laissée sur la roche :
Le dieu y aurait-il posé sa main ?
Ulysse a encouru la terrible colère de l’Olympien, après s’être joué du Cyclope Polyphème. Nous ne tenons pas du tout à subir les mêmes épreuves que le Roi d’Ithaque. C’est pourquoi, à chaque nouvelle navigation, nous sollicitons la clémence des divinités.
Pour la saison qui se prépare, Poséidon semble se laisser amadouer par nos suppliques.
Le tronc renversé nous offre son charme pour la photo souvenir. La pose pacifique est un bon augure.
Des vagues se soulèveraient, mais elles ne s’abattraient pas sur nous. Elles se figeraient, à l’instar de celle qui regarde le capitaine consulter les cartes en papier.
Des cartes en papier, et non sur le GPS ? L’esprit du Zeph se méfie des défaillances à la dernière minute de la technologie moderne. La sagesse de l’Antiquité est toujours notre principale source d’inspiration.
Nous cheminons comme des bergers au temps d’Homère.
Nous passons sous des voûtes qui rivalisent de miroitement dans les teintes de l’émeraude.
La fraîcheur apportée par l’ombre nous délasse et nous ravit.
La pente raide joue avec la légèreté de nos pas.
Comme en mer, il y a du tangage et du roulis. Pour maintenir le cap, il faut bien prendre soin du souffle. Ah, ce fameux souffle, qui est la proie de prédilection du Covid !
Nous nous aventurons jusqu’aux blocs de pierre, qui rappellent les murs cyclopéens de la civilisation mycénienne.
Nous reviennent en mémoire les fortifications des palais construits par le sage roi Nestor, que nous avons appris à connaître quand le Zeph était à Πύλος – ΠΥΛΟΣ.
La couleur de l’émeraude se substitue à l’écarlate, sans rien perdre de l’aspect soyeux, ni de la magnificence.
Nous nous délectons de frugalité.
La découverte du beau est notre principale nourriture.
Nous prenons beaucoup de plaisir à nous asseoir sur les bancs de pierre qui émergent spontanément au milieu de la végétation.
Ils composent le dessin en filigrane de l’hémicycle devant lequel se joue la scène des amours entre la sève du végétal et la lumière solaire.
Des bourgeons s’empourprent sur notre passage.
Dans le parfum de résine qu’ils exhalent, flotte le souvenir que les conifères de la montagne au Sud-Est de la Marina à Αργοστόλι – ΑΡΓΟΣΤΟΛΙ ont fourni à Ulysse le bois des trirèmes en partance pour Troie.
Toutes les photos précédentes ont été faites récemment, sur le GR 9.
Voici l’une des pancartes qui témoignent de leur localisation et de notre récente aventure dans l’autre Royaume de Poséidon.
Ces illustrations servent de pont entre les souvenirs de l’été 2019 et les espoirs en 2020.
Grâce à la magnificence du Vercors français, l’amoureux de la Grèce sublime l’attente. Il est fier que le contretemps causé par le confinement n’émousse pas ses sentiments.
Le Zeph est amoureux de la Grèce, pour toujours.
Quand une relation à deux prospère, elle apporte beaucoup de fierté. Celle-ci demeure-t-elle encore quand une tierce personne entre en scène, sur le même pied d’égalité que les deux autres ?
Presque toujours, la relation à trois est rongée par la rivalité, pour finir dans l’écartèlement et la souffrance.
Le Zeph n’est pas le seul à tomber amoureux de la Grèce.
Le Mayapi aussi a le même coup de foudre, la même passion, le même attachement.
Le Mayapi aime la Grèce telle qu’elle est, c’est-à-dire polymorphe, à la fois sublime et déroutante.
Le Mayapi ne pose aucune condition préalable, ne prépare aucun scénario sélectif, ne refuse aucune surprise, car l’objet de l’amour du Mayapi est une Grèce authentique, et non pas une Grèce idéalisée.
Voilà donc deux amoureux : le Zeph et le Mayapi, qui s’éprennent de la même entité, qui est l’entité égéenne. Tous les deux sont amoureux du même univers savoureux, du même art de vivre millénaire.
Alors, dans cette ronde où tournoient le Zeph, le Mayapi et l’âme grecque, y a-t-il des jalousies qui émergent, des tensions qui naissent et des vengeances qui se préparent ?
Rien de tout cela, absolument rien de tout cela n’a lieu.
En l’occurrence, l’amour est partageur.
L’amoureux, c’est-à-dire le Zeph, tout aussi bien que le Mayapi, est mû par le désir de partager, en toute confiance, en toute quiétude, car l’amoureux a une noblesse d’âme, dont il est très fier.
Voici le Mayapi à Kαλαμάτα – ΚΑΛΑΜΑΤΑ.
On voit qu’il aime beaucoup l’eau du bassin égéen. L’eau salée, bien sûr, où se capture le délicieux poulpe, destiné à grésiller au-dessus de la braise. Mais aussi l’eau douce, qui fait surgir le suc nourricier des champs hellènes.
À côté du drapeau tricolore, il y a le barbecue pour faire griller le poulpe ou le poisson.
Le deux vélos sont adossés contre la borne d’eau douce qui est protégée par des parois blanches.
Voici ce que le Zeph a reçu du Mayapi il y a quatre jours :
Qu’y voit-on ? Le poulpe qui rappelle le Royaume de Poséidon et l’expérience parmi les flots, les pétales blancs de la plante aromatique qui évoque l’enchantement de la terre nourricière depuis les temps ulysséens, des virgules dessinées à l’huile d’olive où se reflète une hospitalité ancestrale.
Y voit-on la plage de sable fin, l’azur à perte de vue, des murs blanchis à la chaux ? Rien de tout cela. On y voit l’authenticité d’un art de vivre, loin des clichés du Club Med. La présentation fait-elle « rêver » ? Le but de ce partage n’est pas de « faire rêver », mais d’émouvoir. Émouvoir par la simplicité, qui exprime à la fois la sincérité et la profondeur des sentiments. Émouvoir par l’élégance du quotidien. Car ce qui apparaît dans l’assiette est tout simplement une cuisine traditionnelle. En donnant à voir ce qui est traditionnel, le Mayapi montre à quel point il a su capter l’âme grecque.
La photo, arrivée à l’heure du repas dominical, est accompagnée du texte suivant :
« Poulpe confit à l’huile d’olive, zeste d’orange et purée de pois chiche »
À travers la délicate attention, il y a la générosité d’un ami.
Le cadeau visuel que le Mayapi fait au Zeph est inestimable, surtout quand on sait qu’il s’agit du fait maison : le Mayapi fait tout, prépare tout, de ses propres mains. Des mains animées par la patience, la gratitude et le dévouement. La patience, car le coût en temps ne compte pas. La gratitude, pour rendre hommage à l’hospitalité grecque. Le dévouement, pour honorer l’amitié entre amoureux de la mer Égée.
Le Zeph est fier, très fier de connaître un autre amoureux, qui éprouve la même inclination pour l’espace égéen.
Cet autre amoureux n’est pas un rival, mais un ami.
Et chose exceptionnelle, celui-ci s’est toujours comporté en ami et se comporte encore en ami, contrairement à ce qu’auraient prévu les scénarios du septième art.
Alors, il y a de quoi être fier, très fier de l’autre amoureux, qui a les mêmes élans, les mêmes aspirations, les mêmes convictions que soi, sans être un sosie de soi.
Oui, il y a vraiment de quoi être fier de cet autre soi-même, éperdument amoureux comme soi-même.
À travers le récent message du Mayapi, c’est la Grèce qui répond au Zeph.
Y a-t-il un bonheur plus grand que celui de la réciprocité ?
Le poète irlandais Oscar Wilde aborde le sujet sur le mode de l’interrogation :
« Who, being loved, is poor ? »
Qui, étant aimé, est pauvre ?
La question, qui est posée avec le ton du défi, n’attend qu’une réponse, qui est : « Personne ! ».
L’amour, ou plus exactement la réciprocité de l’amour, est une richesse fabuleuse.
Il est fréquent que la réussite d’une vie s’évalue à la quantité de richesses accumulées. De manière espiègle, le poète irlandais nous invite à ne pas passer à côté de ce qui est essentiel.
L’esprit grec, forgé par l’héritage de la tragédie antique, considère le sujet avec plus de solennité. Une enfant du Pirée, Μαλβίνα Καράλη – ΜΑΛΒΙΝΑ ΚΑΡΑΛΗ, qui a fait carrière dans l’écriture et dans le septième art, donne la classification suivante :
« Δεν υπάρχουν πλούσιοι και φτωχοί, έξυπνοι και χαζοί, όμορφοι και άσχημοι, υπάρχουν μόνο άνθρωποι που αγαπήθηκαν και άνθρωποι που δεν αγαπήθηκαν. »
Il n'y a pas des riches et des pauvres, des intelligents et des stupides, des beaux et des moches, il y a seulement des gens qui ont été aimés et des gens qui n'ont pas été aimés.
En fin de compte, la véritable différenciation ne se fait pas d’après un critère matériel, intellectuel ou même esthétique. Le seul critère qui la fonde est d’ordre affectif et appartient donc au domaine éthique.
Toute la phrase grecque est articulée sur l’adverbe μόνο (en français : seulement), qui insiste sur l’unicité du critère et, par voie de conséquence, sur le caractère absolument fondamental de l’amour réciproque.
Ainsi, l’amoureux qu’est le Zeph s’estime extrêmement chanceux d’être aimé en retour, par la Grèce, qui missionne le Mayapi. Le message de Kαλαμάτα – ΚΑΛΑΜΑΤΑ, reçu il y a quatre jours, est un émouvant témoignage de la vitalité de cette réciprocité.
À présent, c’est au Zeph de répondre à ce geste affectueux venu de l’Orient. Pour ce faire, il sollicite l’aide d’une poétesse, qui a vu le jour à Constantinople. Elle s’appelle Μυρτιώτισσα – ΜΥΡΤΙΩΤΙΣΣΑ. En reprenant les mots de la poétesse, l’amoureux qu’est le Zeph dit fièrement à l’objet de son amour :
« Σ’ αγαπώ. Δεν μπορώ τίποτ’ άλλο να πω
πιο βαθύ, πιο απλό, πιο μεγάλο ! »
Je t'aime. Je ne peux rien dire d'autre
de plus profond, plus simple, plus grand !
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