• Juillet 2019

    Rester, c'est exister. Mais voyager, c'est vivre.

    Gustave Nadaud, goguettier, poète et chansonnier.

  • Je n'ai pas encore bien pris toute la mesure de la chose !

    C'est grave docteur ?

    On passe le récif dans le chenal de CORFOU

     

    Vivre sur un bateau quelques semaines par an, c'est de la plaisance dit-on ! On accepte facilement les petites contraintes d'une telle expérience ! C'en devient presque un jeu ! Faire la vaisselle avec un litre d'eau, pour économiser les réserves, se prendre des micro-douches froides et marcher à 4 pattes quand ça bouge un peu !

    C'est grave docteur ?

    Un chalutier nous double...

     

    Vivre quelques semaines par an sur un bateau, c'est presque aussi un privilège... Celui de la liberté d'aller et venir où bon nous semble. La liberté du mouillage (Hum, hum !)... La Liberté du TEMPS. C'est aussi un privilège de pouvoir passer du temps, à l'abri au fond d'un port, et souvent en plein cœur de la cité. Comme ici, à CORFOU...

    Déjà une semaine qu'on est sur ce bout de môle, à couple d'un remorqueur désaffecté, la ville et son animation à deux pas.

    C'est grave docteur ?

    CORFOU droit devant.

     

    La plaisance... Dans son sens premier, c'est d'abord un loisir nautique ! Un loisir... Une activité qu'on fait pour s'amuser !!

    C'est grave docteur ?

    J'opte pour le vieux port de pêche... La chance aidant, nous trouvons une place à couple d'un remorqueur désarmé. On ne risque pas de gêner ! Et bien sûr, c'est gratuit...

     

    Vivre quelques semaines par an sur un bateau, c'est effectivement un loisir. Mais quand on passe de quelques semaines par an à quelques mois, voire à la vie tout court, il y a une évolution notable de la condition humaine à bord !!! Il faut alors prendre vite la mesure des choses...

    C'est grave docteur ?

    Et voilà.

     

    La mesure des choses... Les petits gestes du quotidien doivent toujours être pesés et réfléchis. Sinon, on va vite s'apercevoir qu'on aurait dû le faire !... La blessure te guette, p'tit père ! Sournoise... Parce que partout sur un bateau, y'a des obstacles. A chaque pas ! Et les chances de s'en prendre un sont favorablement bonnes !!! Le mousse et son tibia ensanglanté par une courte glissade dans  l'escalier du carré, le pied droit du capt'ain meurtri par trois fois et le pouce de sa main gauche qui s'est vrillé en tentant de rétablir une rupture d'équilibre passablement ridicule !

    C'est grave docteur ?

    Sitôt amarré, on file manger notre première pita au meilleur resto du coin !

     

    Et puis, il n'y a pas que les gestes du quotidien... Y'a aussi tout le reste ! C'est une nouvelle façon de vivre.

    Et cette nouvelle façon de vivre a un prix. Non négociable. Faut payer, p'tit père ! A défaut, on peut vite basculer dans le côté "abandon" de soi. Dans le côté romano quoi ! (rien à voir avec les romanichels, gitans, bohémiens et compagnie, hein ? Que la chose soit entendue !).

    Mal manger parce qu'il faut faire les courses, prendre l'annexe pour aller à terre, même si y'a du vent ou de la mer..., et ne pas toujours trouver ce qu'on a besoin, certains endroits étant bien reculés... Et quand tu trouves, c'est souvent trop cher !

    - Et mal boire aussi ?

    - Oui, oui ! Aussi !

    Mal se laver (ou pas se laver du tout !!!) parce que l'eau douce peut être rare et difficile à trouver (je ne parle pas de creuser un puits...) et que si, pour refaire les pleins, tu dois crapahuter avec ton bidon de 20 litres, ben t'as tendance à te dire que tu te laveras une prochaine fois !

    Pas d'eau ou peu d'eau, c'est pas de lessive non plus !

    - Alors, tu manges mal, tu bois que d'l'eau, tu dors mal dans des draps poisseux et tu pues ?

    - ...

    - La plaisance !!! Ça te ratatine !

    C'est grave docteur ?

    Posée au milieu du carrefour, une chapelle en guise d'ex-voto.

     

    Bref. Après avoir été un terrien sédentaire, te v'là à apprendre le nomadisme, le vagabondage ! Et ce n'est pas péjoratif de le dire, même si... Parce quand on regarde les synonymes de vagabond, on trouve : ambulant, aventurier, bandit, bohème, bohémien, buissonnier, camp-volant, chemineau, chiffonnier, clochard, cloche, clodo, comète, couche-dehors, coureur, déréglé, désordonné, errant, flâneur, flottant, fugitif, galvaudeux, gueux, homme sans aveu, instable, libertin, malandrin, mendiant, misérable, nomade, pauvre, rétif, ribleur, rôdeur, trainier, trimardeur, truand, va-nu-pieds et ... Voyageur ! Ce n'est pas vraiment toujours flatteur, hein ? Alors... Ça vous fait toujours rêver la vie en bateau ?

    C'est le prix à payer pour être libre, autonome, et ne devoir rendre des comptes qu'au Grand Manitou !

    C'est grave docteur ?

    Les places dans le vieux port sont souvent disputées. J'ai offert le flanc du ZEF à un Allemand qui a eu la délicatesse de demander qu'on le lui prête ! D'autres n'auraient pas demandé...

     

    Et encore, y'a pas qu'ça ! Y'a aussi la contrainte du temps qu'il fait... Le vent, la mer... La météo quoi ! Vivre sur la mer, c'est vivre sur la peau du Diable !... Et parfois, c'est bien (c'est mieux) de faire un peu attention !

    C'est grave docteur ?

    Juste devant, et sous le remorqueur, une épave gît. Son mât brisé s'enfonce dans l'eau du port à l'aplomb du nez du ZEF.

     

    Je parle de tout ça parce que je n'ai pas encore le réflexe du nomade, du vagabond, du voyageur au long cours !

    C'est grave docteur ?

    Comme on voulait passer une petite semaine ici, si je n'avais pas trouvé de place dans le vieux port de pêche, j'aurais tenté ma chance ici, dans le port de MANDRAKI. Bien sûr, il aurait fallu  s'alléger le porte-monnaie de quelques dizaines d'€ par jour...

     

    Il faut savoir préserver sa monture mais aussi son Σώμα – ΣΩΜΑ (soma), son corps ! Par exemple, tout à l'heure, j'ai pas bien fait attention... J'ai escaladé un quai rugueux de 1 mètre de haut depuis l'annexe, et pieds nus... Ben oui, OK, je me suis ouvert le pied ! J'vois ce qu'il y a d'dans !!!

    C'est grave docteur ?

    Le port de MANDRAKI idéalement situé sous la citadelle.

     

    Voilà. Je navigue depuis quelques temps déjà (2007), mais désormais, je suis dans l'apprentissage d'une nouvelle vie ! Et j'en suis qu'au chapitre 1, premier alinéa, du grand Livre de la Vie qui compte 10 tomes !

    Autant dire que je risque bien d'avoir de nouvelles surprises !

    - Au secours !... Je voyage en bateau !

    - C'est grave, docteur ???

    C'est grave docteur ?

    Bon. Ben c'est moi, ça !

     

    Après une semaine, donc, sur notre bout de môle, on est parti en direction de PETRITI, toujours sur l'île de CORFOU, puis, au milieu du trajet, on s'est dit qu'on ferait mieux de virer en direction de PLATARIAS.

    C'est grave docteur ?

    La vue de CORFOU depuis le bateau. Alors c'est gratuit mais on a ni courant (on s'en fout, on est autonome...), ni eau courante (on s'en fout, on a trouvé un robinet pas loin !)...

     

    Première manœuvre de mouillage dans un port avec le mousse aux commandes du guindeau ! Ça s'est bien passé. Très bien même. Alors je crois que je vais le garder encore un peu ! Ça fait monter sa cote !

    C'est grave docteur ?

    Comme je disais, les places sont chères parce que gratuites ! Bizarre comme tournure de phrase, non ?  A tel point que le voilier coque bleu (un mangeur de poudingue) qui a pris la place d'un pêcheur a semé la discorde dans tout le port !

     

    A PLATARIAS, le port est payant. 20 € par nuit. Même que nous, on paye que 10... Parce qu'on reste 2 nuits. C'est logique, non ?

    C'est grave docteur ?

    L'ambiance... Le ZEF  est bien calé sur son remorqueur !

     

    Et c'est ainsi qu'on nomadise à nouveau en attendant d'aller nomadiser plus loin, plus tard, plus longtemps !

     

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