• Le choix était librement consenti, guidé et inévitable.

    « Inévitable » car les Crétois détiennent le quasi monopole des liaisons maritimes entre Ancona Dorica et les deux ports d'entrée de la Grèce sur l'Adriatique.

    « Guidé », parce que nous tenons compte de l'expérience de l'an dernier, où nous étions partis avec des Crétois, et revenus avec des Crétois.

    « Librement consenti », car nous aurions pu choisir une autre formule pour le transit, en prenant, par exemple, la voie des airs, mais nous avions préféré renouveler le partenariat de l'an dernier.

    Le transporteur qui nous a menés de la rive occidentale à la rive orientale de l'Adriatique était « Anek Lines ». Sous les cheminées sommitales, une carte de la Crète rappelait qu'à bord, l'art crétois était à l'honneur.

    L'esthétique crétoise ne privilégie pas le chemin le plus court, mais le chemin le plus sensuel. Les fresques murales du palais de Cnossos exhibent des motifs floraux avec une profusion de lignes incurvées.

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    L'enroulement donne lieu à des formes ouvertes, comme les spirales, ou à des formes fermées, comme les cercles.

    La piste de danse du ferry crétois a réinvesti le ballet des inflexions :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Une couronne de fenêtres circulaires faisait rentrer la lumière extérieure.

    Le pourtour de la piste de danse se parait de mains courantes, dont le profil lascif était une incitation à s'abandonner sans crainte.

    Les tables d'appoint participaient à la sensualité du lieu en offrant des contours qui attendaient d'être caressés langoureusement.

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    L'effet miroir associait les formes fermées et les formes ouvertes. Mais dans cette union, rien ne heurtait, ni ne blessait.

    Le dessus de la table d'appoint ressemblait à une tranche de poire, qui nous faisait les yeux doux.

    L'esthétique crétoise était fluidité, aisance et délice !

    La piste de danse proprement dite bénéficiait d'une enveloppe dont le volume rappelait celui d'une citrouille :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Le renflement, généreusement accentué, évoquait la volupté.

    L'esthétique crétoise utilisait la ligne courbe pour célébrer la vie végétale, mais aussi pour magnifier le souffle de vie chez l'animal.

    Voici une représentation du taureau de Crète à bord du ferry :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    La fresque se trouvait dans le Grand Salon, situé au neuvième étage, juste sous la piste de danse.

    La courbure naturelle des cornes était mise en valeur par les reflets d'or.

    La peinture reprenait la silhouette d'un rhyton, destiné aux libations.

    La communion avec la divinité n'empruntait pas la ligne droite, mais un chemin ondulant.

    À gauche du Taureau de Crète, était représentée une colonne qui évoquait l'architecture du palais de Cnossos :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Le tronc de la colonne n'était pas cylindrique mais conique. Soit. Mais est-ce normal que la petite base soit au-dessous tandis que la grande base soit au-dessus ? Les architectes crétois se seraient-ils trompés de sens ?

    Un premier élément de réponse se trouvait dans la place de choix qu'occupait le lotus dans le programme iconographique. La fleur du lotus avait une base étroite et une tête élargie.

    Voici une stylisation des plis d'une robe avec la floraison du lotus :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Le personnage féminin de la fresque participait à une cueillette de safran.

    La colonne conique serait aussi une stylisation du lotus.

    Il existerait un deuxième élément de réponse, qui ne se réfère pas à l'analogie des formes, mais à l'audace créatrice de l'artiste.

    D'ordinaire, une pyramide en architecture s'imagine avec, en bas, la base carrée et, tout en haut, le sommet pointu, comme les Pyramides sur le plateau de Gizeh, en Égypte :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Or, le Louvre réserve au visiteur une belle surprise dans le Carrousel du Musée :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Une pyramide renversée s'y trouve, haute de sept mètres.

    Plus de trente-sept siècles avant la surprise du Louvre, le génie crétois s'est plu à inventer la formule du « cône renversé » et à la propager.

    Dans un premier temps, le « cône renversé » pourrait induire la vision du déséquilibre, du risque et du danger. Toute la gageure est d'en faire quand même une structure qui tient par sa stabilité.

    Voici une vue d'ensemble de la fresque crétoise qui ornait le Grand Salon du ferry :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    L'éclat de l'or sur la fresque était rehaussé par une lampe qui jonglait avec la forme conique. Au niveau supérieur, l'abat-jour montrait la forme habituelle. À l'inverse, l'axe de la lampe était habillé par un cône renversé.

    Aux coins stratégiques du Grand Salon, le double cône apportait la belle lumière qui faisait penser au faste du palais de Cnossos :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    L'esthétique crétoise privilégie la ligne courbe pour illustrer la vie pleine de surprises. Le renversement du cône est une traduction du suspens lié au jeu inéluctable entre le déséquilibre et l'équilibre.

    Nous étions ravis de faire la traversée de l'Adriatique en compagnie de l'esthétique crétoise. Voici les derniers instants avant de débarquer sur le rivage grec :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Nous sommes descendus à Ηγουμενίτσα – HΓΟΥΜEΝΙΤΣΑ.

    Le ferry crétois, lui, s'en allait vers Πάτρα – ΠΑΤΡΑ.

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Nous avons retrouvé le Zeph avec beaucoup d'émotions.

    Nous avons fêté ces retrouvailles avec une cuisine inspirée par l'esthétique crétoise :

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    Le rouleau de poulet farci présentait la rondeur de la citrouille qui avait donné sa forme à la piste de danse.

    Les poivrons étaient taillés en arcs pour faire ressortir la ligne courbe. Les arcs, qui étaient de trois couleurs : jaune, orange et rouge, étaient rissolés dans le jus de la farce au fromage.

     

    Le choix de l'esthétique crétoise

     

    La retsina était servie dans des verres dont la panse rappelait le renflement de la piste de danse sur le ferry.

    Le choix de l'esthétique crétoise est celui de l'imprévisible et de la sensualité.

     

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