• Le raffinement est un plus, qui donne de l’élévation à l’être.

    Le savoir aiguise l’esprit et contribue au raffinement de l’existence.

    À Οθωνοί – ΟΘΩΝΟΙ, face à la mer, le bâtiment de l’école publique exhibait volontiers des ornements architecturaux qui caractérisaient depuis l’antiquité les lieux où la culture était synonyme de raffinement.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Il s’agissait des acrotères qui se déployaient au sommet de la toiture.

    Le motif décoratif habituel était celui des palmettes florales.

    Malgré la prédominance des activités liées au tourisme, le rivage a ostensiblement préservé un espace sanctuarisé, qui était dédié à l’acquisition du savoir.

    Le raffinement était dans la volonté de magnifier cet espace avec l’élégance des ornements architecturaux qu’étaient les acrotères.

    Même ambition culturelle à Παξοί – ΠΑΞΟΙ, où l’espace muséographique s’installait face à des proues et des poupes, tout près d’elles. Il s’affranchissait avec aisance de la frénésie bigarrée du négoce lié à l’afflux des bateaux visiteurs et dressait fièrement sa silhouette parée du plus pur classicisme.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Aux endroits les plus élevés de l’édifice, se développait l’acrotère, emblème de la transmission du savoir.

    Le symbole des lieux du savoir évoquait le raffinement de l’esprit, donc une bonne réputation. C’est pourquoi des hôtels, comme celui-ci à Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ, mettaient bien en vue le profil ailé de l’acrotère pour signifier que leurs établissements étaient hautement recommandables en raison de leur grande honorabilité :

     

    Le raffinement du rivage

     

    L’emblème hérité de l’architecture antique servait de caution à la qualité des services offerts par la technologie moderne.

    L’honorabilité d’une demeure était un sujet de fierté pour ses occupants. C’est pourquoi à Κορώνη – ΚΟΡΩΝΗ, nombre de maisons en bord de mer s’enorgueillissaient de leurs acrotères triomphants. Ces ornements architecturaux étaient alors autant d’étendards qui proclamaient le raffinement d’un mode de vie.

    Y avait-il une grammaire de l’iconographie exhibée sur ces acrotères ?

    La richesse des motifs de décoration révélait un esprit raffiné et une existence aisée.

    Sur le toit d’un domicile où l’ocre de la terre cuite jouait avec le rouge des corolles, des têtes différentes occupaient le centre des palmettes architecturales.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Très souvent, la figure centrale était celle de la féminité. C’était l’effigie d’Athéna.

    Mais ici, au sommet de la demeure, le raffinement donnait naissance à une variation, en remplaçant le féminin par le masculin. Cette rareté ornementale indiquait l’ouverture d’esprit et la richesse de l’inspiration.

    La culture est une affaire sérieuse, mais non dénuée d’humour.

    C’est pourquoi, un rictus apparaissait au milieu des évocations de l’élégance du bonheur.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Cette galerie de portraits aériens était un véritable enchantement pour ceux qui savaient tourner le regard vers le haut, au sens propre comme au sens figuré.

    L’acrotère est une floraison avec une figure humaine au milieu. La plante qui coiffe la tête parle du lien très étroit qui relie l’univers de la végétation et l’esprit humain dans la recherche de l’esthétique, menée depuis l’antiquité.

    De nos jours, l’alliance entre le décor végétal et le regard reste féconde en trouvailles charmantes, comme on pouvait le constater, à Κυπαρισσία – ΚΥΠΑΡΙΣΣΙΑ, sur la place centrale.

    Cette place centrale regorgeait de terrasses qui courtisaient la fraîcheur.

    Fraîcheur de l’ombre bienfaitrice, grâce aux feuillages, aux parasols, aux tentures.

    Fraîcheur de l’eau jaillissante dans le grand bassin ou de la vapeur envoyée par les brumisateurs.

    C’était sur cette place que nous venions chercher le goût délicieux de la viande grillée.

    À l’angle Sud-Est, qui donnait sur la poste, des fleurs s’épanouissaient allègrement sur une mob qui servait de jardinière.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Surprise ravissante pour le visiteur qui traversait la place à cet endroit. L’effet surprise témoignait de la subtilité du raffinement.

    Par symétrie, il existait, sur l’autre côté de la rue, une composition florale équivalente, avec le même dispositif de sustentation.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Mais le trottoir d’en face n’était pas consacré à la détente ou à la rêverie. Il respirait la fébrilité du commerce et des affaires. Néanmoins, toute personne qui le parcourait avait droit à un clin d’œil sur l’Éden portatif.

    Avec le soleil du matin, c’était la mob fleurie du côté des boutiques qui était éclairée. Avec la lumière de l’après-midi, c’était sa jumelle du côté des terrasses qui resplendissait.

    Le raffinement se voyait dans le respect de la parité, dans l’impartialité de l’offre et dans la gratuité du plaisir.

    Κυπαρισσία – ΚΥΠΑΡΙΣΣΙΑ réservait une autre belle surprise au regard qui manifestait de l’intérêt pour des lieux discrets, à l’apparence abandonnée et ne bénéficiant d’aucun tapage publicitaire.

    Pour aller du château au port, maints chemins s’offraient à nous. Le hasard du choix nous a fait passer devant un escalier rustique que disputaient l’ombre et la lumière.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Depuis longtemps, plus personne n’avait mis les pieds sur les marches de pierre. Néanmoins, le projet de l’ascension était fleuri, admirablement, par une main inconnue. Des bacs métalliques, ravivés par la chaux, contenaient les réserves d’humus et d’eau. La plante prospérait.

     

    Le raffinement du rivage

     

    La fleur, gracile, illuminait les lieux.

    Magnificence sans grandiloquence, finesse sans sophistication.

    Le spectacle de la simplicité et de la pureté déclenchait immédiatement le ravissement.

    Le raffinement a transformé cet espace boudé par la fièvre immobilière en un splendide jardin suspendu.

    Il arrivait que le raffinement résidait non seulement dans l’intention de fleurir des lieux insolites, mais aussi dans la constitution de bouquets fort originaux.

    Un exemple de ce raffinement à double expression se voyait à Μεγανήσι – ΜΕΓΑΝΗΣΙ.

    À Μεγανήσι – ΜΕΓΑΝΗΣΙ, le Zeph était amarré au fond de la baie, la proue à l’Ouest et la poupe à l’Est. Le quai des animations, c’est-à-dire celui des terrasses des restaurants, s’étirait au Sud, perpendiculairement au quai principal des amarrages. Ce quai des animations en soirée était celui des livraisons de marchandises en matinée. Voici une photo de ce quai des livraisons :

     

    Le raffinement du rivage

     

    Un camion, chargé en cagettes de fruits et légumes de toutes sortes, était en train de ravitailler en tomates fraîches, pour le repas de midi, un chef cuisinier. Le long du trottoir d’en face, était garé un véhicule rouge. Au premier plan, c’était l’exubérance de la décoration florale de la terrasse d’un restaurant. Entre l’avalanche de fleurs au premier plan et les deux véhicules arrêtés, il y avait un croisement, d’où partait un ponton réservé aux barques de pêche. Si, au lieu d’aller tout droit, le véhicule rouge tournait sur sa droite, il emprunterait le ponton des pêcheurs.

    Le spectacle du raffinement avait lieu à l’entrée de ce ponton, derrière la silhouette d’un vélo.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Le raffinement était dans la délicate attention accordée à ce qui, habituellement, était peu digne d’intérêt, comme un bloc de pierre ou un poteau métallique pour poser un vélo.

    D’accord pour la délicate attention. Dans ce cas, pourquoi le bouquet était-il tout sec ? Aurait-il été victime d’un oubli, volontaire ou involontaire, de l’arroseur ? Il ne fallait pas voir dans l’aspect desséché le résultat d’une négligence. C’était une nature morte, volontairement composée avec des tiges séchées, qui était offerte au regard du promeneur attentif. À la base, un filet contenait de la terre, de la vraie, pour dire que les plantes au-dessus étaient aussi des vraies, et non des imitations, en plastique ou en tissu.

    Un bouquet en lieu et place du néant ! Une nature morte pour fleurir l’endroit tout en évoquant le temps qui passait. Le raffinement était dans le projet de conjurer le vide, non pas par un déploiement habituel de la vitalité, mais par une évocation inattendue de la fuite du temps.

    L’esprit de la fête pouvait être évoqué par un bouquet ou par un paquet cadeau.

    Sur le rivage de Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ, l’image du paquet cadeau fleurissait là où l’on ne s’y attendait pas.

    Tiens, un colis sur le pas d’une porte.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Un paquet cadeau que venait de déposer un messager, déjà reparti.

    Le balai disait que c’était une porte de service et évoquait la routine d’un travail répétitif, voire ingrat. La grosse pierre, qui se trouvait à l’angle opposé, parlait de la rudesse des conditions de vie. Pourtant, sa masse minérale était habillée comme un cadeau attendu pendant les jours de fête. Était-ce pour signifier que dans toutes les circonstances, il y avait motifs à se réjouir ? Le raffinement était dans cette culture de l’optimisme.

    Le ruban qui entoure les paquets cadeaux se termine souvent par un joli nœud.

    Que faisait ce nœud rouge à proximité d’un compteur ?

     

    Le raffinement du rivage

     

    Un compteur, c’était pour enregistrer une consommation, qui donnait lieu à une redevance, à des taxes, à un impôt indirect. Il pouvait évoquer les difficultés en fin de mois, des impayés, l’intervention des huissiers. Y aurait-il de l’ironie dans le rouge éclatant du nœud, gonflé dans tous les sens du terme ?

    Et lui, le nœud couleur de l’azur, que faisait-il là, sous un fil électrique ?

     

    Le raffinement du rivage

     

    C’était un fil qui amenait l’énergie, dont le réapprovisionnement ne fonctionnait plus, car la maison semblait déserte. Mais le nœud, qui n’oubliait pas d’être resplendissant, avait la couleur de la mer et du ciel. C’était la couleur qui disait la disponibilité de la force motrice des flots et la disponibilité de l’énergie solaire. Le nœud bleu était donc une marque d’optimisme malgré la crise économique. Optimisme grâce à la générosité de la Nature, comme dans l’antiquité.

    Dans ce cas, la couleur rouge du nœud à côté du compteur était aussi une incitation à l’optimisme. C’était la couleur d’un cœur chaleureux, prompt à l’entraide et passionné de solidarité. C’était la couleur du zèle dans l’amour à l’égard du prochain.

    À deux pas de là, toujours sur le même rivage, les rebords de deux fenêtres d’une maison fermée et abandonnée servaient de vitrines, comme dans un Musée d’Histoire Naturelle.

     

    Le raffinement du rivage

     

    Présence minérale, végétale ou zoologique.

    Rien n’était créé par l’humain, qui s’est contenté de ramasser, de collectionner, de trier et de présenter.

    On pouvait contempler la disposition d’ensemble, se rapprocher aussi près que l’on voulait pour scruter les détails, et même effleurer avec le bout des doigts. Aucune vitre de protection, aucun système d’alarme. Une liberté totale pour jouir du spectacle et en respecter l’intégrité matérielle.

    Aucun ticket d’entrée n’était exigé. L’exonération était pour tous.

    Pour qui était prévue cette exposition ? À qui s’adressait-elle ? À tout le monde.

    Mais qui passait par là ? Pas grand monde !

    Qui était susceptible de s’y arrêter ? Presque personne. Surtout pas celles et ceux qui étaient en quête de sensationnel !

    À quoi servait cette vitrine ? À réjouir les esprits qui prenaient en compte les choses dites « ordinaires » ou « insignifiantes ».

    En effet, qu’y avait-il de spectaculaire dans un galet, dans un coquillage incrusté, dans une pointe d’oursin séché et desséché ?

    Rien de spectaculaire, effectivement. C’était même quelconque, diraient certains. Mais pour ceux qui y voyaient des parcelles du cosmos environnant, c’étaient des ex-voto qui glorifiaient l’harmonie du monde, harmonie qui remplissait de bonheur et l’artiste inspiré et le visiteur éveillé.

    Le raffinement était dans l’éloge de la grandeur de l’univers avec l’utilisation de moyens simples et modestes.

    Hymne à l’harmonie du cosmos, l’exposition des ex-voto exprimait la quiétude de l’instant présent et la confiance en l’avenir, malgré la persistance de la crise économique.

    Sur le rivage de Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ, le raffinement résidait dans la beauté d’une présentation épurée. Le discours n’était pas ampoulé. Le message n’était pas sophistiqué. La mise en scène n’était pas grandiloquente.

    Que des choses simples, connues de tous, accessibles à tout le monde.

    Des choses simples, assemblées simplement.

    L’assemblage, insolite, surprenait, mais ne dérangeait pas. Au contraire, il enchantait.

    L’effet surprise décuplait le plaisir de la découverte.

    Pas de vacarme, pas de tumulte, pas de bruit racoleur, pas de bavardages forts.

    Mais le silence, celui du sourire, des sourires.

    Sourire de la vie, à la vie, à chaque pas, dans chaque recoin.

    Le spectacle ne cherchait pas l’attrait du sensationnel, mais l’envoûtement par la délicatesse.

    À Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ, le raffinement était non seulement d’ordre esthétique, mais aussi d’ordre éthique.

    Le visiteur était libre, entièrement libre. Libre d’aller et venir comme il entendait, de monter et de descendre comme il voulait, de revenir sur ses pas autant de fois qu’il le souhaitait. Aucun parcours fléché. Aucun dirigisme spatial. Aucune contrainte temporelle non plus. Pas d’heure de clôture, pas d’heure d’ouverture non plus.Un seul critère à prendre en compte : la disponibilité de la lumière du jour. Mais là encore, ce n’était pas une obligation. Car la personne qui voulait faire la visite le soir, après le coucher du soleil, avec ou sans le clair de lune, pouvait la faire. Rien ne s’opposait à une découverte en soirée. Les séances nocturnes étaient permanentes tout au long de la semaine.

    Cette liberté totale accroissait considérablement le plaisir de l’exploration. L’absence de barrières codifiées et la tranquillité des lieux procuraient à la contemplation une exquise sensation de plénitude. L’intériorisation du spectacle offert était d’autant plus intense que rien ne venait le parasiter, ni carcan, ni tumulte.

    Aucune clôture à franchir.

    La jouissance de la liberté était un cadeau qui témoignait d’une grande confiance. Les artistes anonymes mettaient leurs œuvres à la disposition de tout le monde, sans craindre aucune dégradation, malgré l’apparence déserte des lieux, l’absence de surveillance ou les tentations engendrées par l’obscurité de la nuit.

    On faisait appel au bon sens, à la maturité, au sens des responsabilités du visiteur.

    Il y avait dans le respect de l’autre et des biens d’autrui, le respect de soi-même.

    Le raffinement du rivage était dans la transformation de ce territoire de l’art en domaine de jouissance pour des consciences éveillées et responsables. Car en Grèce, c’est sacrilège de toucher, par le vol ou la dégradation, à ce qui est beau.

    Le raffinement se manifestait par l’absence de crainte à l’égard du vandalisme et par la confiance, raisonnée et légitime, dans la pérennité de l’œuvre d’art.

    Le rivage de Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ respirait le contentement et suivait en cela l’exemple de l’apôtre Paul qui disait :

    οἶδα δὲ ταπεινοῦσθαι οἶδα καὶ περισσεύειν· ἐν παντὶ καὶ ἐν πᾶσιν μεμύημαι καὶ χορτάζεσθαι καὶ πεινᾶν καὶ περισσεύειν καὶ ὑστερεῖσθαι

    ΕΠΙΣΤΟΛΗ ΠΡΟΣ ΦΙΛΙΠΠΗΣΙΟΥΣ. Kεφ. δ’. Στίχος ιβ’

     

    Je sais vivre dans la pauvreté aussi bien que dans l'abondance. J'ai appris à être satisfait partout et en toute circonstance, que je sois rassasié ou affamé, que je sois dans l'abondance ou dans le besoin.

    Épître aux Philippiens. Chapitre 4. Verset 12

     

    L’art du contentement témoigne du raffinement éthique.

    Les Grecs de Μύτικας – ΜΥΤΙΚΑΣ savent garder leur satisfaction, même lorsque la conjoncture internationale leur est défavorable.

    Le raffinement est un refus de la trivialité. Il fuit le tapage.

    Il est l’éloge de la nuance et se love dans le détail.

    Il ne s’offre qu’aux esprits qui ont la disposition mentale pour l’apprécier.

    Les modes changeantes de l’ère moderne et les tracas de la crise économique persistante n’ont pas effacé du rivage grec le désir de raffinement, hérité de l’antiquité.

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