• L’ocre crétoise prenait plaisir à nous accompagner dans les randonnées. Sa présence nous enchantait car elle accentuait le dépaysement. Nous avions la sensation de nous mouvoir dans un décor spécialement conçu pour le septième art. Nous voici sur le sentier qui devait nous mener de Παλαιόχωρα – ΠΑΛΑΙΟΧΩΡΑ (en français : Palaiokhôra) à Σούγια – ΣΟΥΓΙΑ (en français : Souyia), sur la côte méridionale :

     

    La Crète et son ocre

     

    Au milieu d’un fantastique bourgeonnement de la roche, le Capitaine affichait son sourire. Étions-nous arrivés à destination ? Avions-nous atteint notre objectif ? Loin de là !

    En vérité, nous nous préparions à rebrousser chemin. Il nous restait encore un cinquième du parcours à faire, en direction de la droite de la photo. Mais le soleil était déjà bien bas : on le voyait qui chargeait l’ocre en pigments. Nous redoutions d’être pris dans le piège de l’obscurité sur un sentier difficile. Alors nous avons pris la décision de faire demi-tour.

    Échec ? À première vue.

    Le véritable échec aurait été de mourir de froid ou de soif sur le sentier, ou d’en revenir estropiés à cause d’un accident causé par la nuit tombante.

    L’ocre embellissait le décor avec des teintes magnifiques, mais elle disait en même temps qu’il était temps de rentrer. Nous n’avons pas abandonné sans regret. Par sa présence chaleureuse, l’ocre compatissait à notre embarras. Après une longue délibération, nous avons choisi la voie de la sagesse. L’ocre nous a alors offert le réconfort de ses ondes positives.

    Face au soleil couchant, le Capitaine a dit au revoir, avec le sourire, au dernier tronçon du parcours.

    En plus de la beauté plastique, l’ocre crétoise déployait son sens de l’empathie.

    Son apport ne se cantonnait pas à l'esthétique, elle concernait aussi l'éthique. Son giron chaleureux n'était associé à aucune opposition, à aucune contrariété, à aucun stress. L'ocre crétoise ne heurtait pas, ne terrifiait pas, n'induisait pas en erreur. Au contraire, elle rassurait, encourageait, consolait. L'énergie positive qu'elle communiquait avec douceur permettait de relever la tête en cas de dure épreuve et de trouver l'issue.

    Ainsi, l'ocre crétoise inspirait les élans vers le haut. Elle soulevait le corps, élevait l'âme.

    Voici ce que nous avons découvert quand nous avons levé le regard à la fin de notre promenade dans le plateau du Λασίθι – ΛΑΣΙΘΙ (en français : Lassithi) :

     

    La Crète et son ocre

     

    L'ocre de la terre s'unissait à l'ocre du ciel.

    Mais chaque partie conservait sa particularité.

    L'ocre de la terre a préféré tourner au brun tandis que l'ocre du ciel a choisi un virage au rose :

     

    La Crète et son ocre

     

    D'aucuns pourraient penser que l'ocre troublait la pureté du ciel. Nullement ! L'ocre était venue pour donner plus de vie à la limpidité de l'azur.

    Le toit de notre carrosse était tout heureux de servir de miroir à ce splendide diptyque.

    Autre exemple de l'intérêt que l'ocre portait aux régions d'en haut : le jaillissement des flammes dans la cheminée de la maison à Σίβας – ΣΙΒΑΣ (en français : Sivas), qui était la quatrième halte du périple crétois.

     

    La Crète et son ocre

     

    Ocre d'un plaisir nouveau. Ocre de la joie.

    Depuis le début du voyage en terre crétoise, le Capitaine rêvait de pouvoir allumer un feu chaque soir pour donner plus de romantisme à l'ambiance grâce au crépitement des bûches. Désormais, son désir était généreusement comblé par l'ocre dansante, éclairante et chauffante des flammes.

    Σίβας – ΣΙΒΑΣ était aussi le site d'une autre manifestation aérienne de l'ocre.

    Voici l'ocre prête à bondir :

     

    La Crète et son ocre

     

    Le pelage du félin utilisait deux formes d'ocre : l'ocre jaune et l'ocre brune.

    La tête et les yeux étaient tournés vers le haut. Tout le corps se préparait à s'élancer dans la direction du regard.

    Le point d’atterrissage visé était le balcon où le mousse était en train de plier la literie. C'était la dernière matinée dans la maison à Σίβας – ΣΙΒΑΣ. Devant la fébrilité de l'activité de rangement, le félin a compris que c'était le moment des adieux. Alors il voulait tenter le saut périlleux afin de rejoindre celui pour qui il avait eu le coup de foudre.

    L'ami prêt à bondir avait reçu de notre part le nom de « Mirador » parce qu'il aimait se jucher en hauteur pour mieux profiter du spectacle.

    Dans son article « Sivas », publié le le 5 décembre 2021, le Capitaine a décrit à quel point « Mirador » était fasciné par le mousse.

    À présent, le mousse se préparait à s'en aller, sans doute pour toujours. Alors, « Mirador » au joli pelage ocre, complètement affolé, tentait de freiner le cours des choses en usant de sentiment. Si son corps soyeux arrivait à se blottir à nouveau contre les chevilles du mousse, peut-être que le départ de celui-ci serait retardé !

    D'où le fameux saut périlleux pour rétablir l'agréable contact épiderme contre épiderme.

    Le cadre physique de ce saut périlleux se voit sur la septième photo de l'article « Sivas », publié le 5 décembre 2021.

    Le mur où était posté « Mirador » se trouvait à gauche.

    Surplombant ce mur, un balcon prolongeait l'espace de la chambre à l'étage.

    En fait, « Mirador » n'a pas tenté qu'un saut périlleux. Il en a réalisé cinq et les a tous réussis !

    Ocre de la persévérance. Ocre de la fidélité.

    Ocre d'un émouvant attachement.

    Ocre d'une belle amitié.

    L'ocre était présente au sol, dans les airs, et bien sûr, en mer.

    Dans le contexte de l'espace marin, c'était la couleur d'un envoûtement et d'une nostalgie. Envoûtement devant des guirlandes d'ocre rose que les vagues s'amusaient à confectionner sur le sable.

     

    La Crète et son ocre

     

    La singularité de ce spectacle nous faisait penser à la poussière de corail, que l'onde collecterait pour vanter encore plus l'aspect paradisiaque de l'île.

    Lors de notre première venue dans ce paradis, nous avons dormi à la belle étoile sur un talus herbeux, au milieu d'une multitude d'aromates sauvages.

    Ce lieu magique avait pour nom Ελαφονήσι – EΛΑΦΟΝΗΣΙ (en français : Elaphonisi).

    La nostalgie de l'ocre magique qui s'y était déployée rendait impérieux le moment des retrouvailles. Celles-ci ont fini par avoir lieu à la dernière saison.

    L'ocre rose était encore là, au charme immuable. Pour notre bonheur, d'autres ocres lui tenaient compagnie. En effet, la végétation des dunes de sable revêtait avec magnificence plusieurs nuances de l'ocre brune.

     

    La Crète et son ocre

     

    Au milieu des touffes d'herbes sauvages, une surprise nous attendait : une branche de laurier se dressait là, non pas avec la couleur verte habituelle, mais avec les reflets de l'ocre brune ambiante. Une main humaine, bien inspirée, était à l'origine de cette plantation, qui était comme un ex-voto. L'offrande célébrait l'osmose avec l'énergie cosmique. Symbole apollinien qui nous ravissait à l'extrême.

    Face au soleil couchant, nous avons voulu immortaliser ces retrouvailles mémorables :

     

    La Crète et son ocre

     

    L'ocre rose colorait la chaîne de montagnes à l'arrière-plan.

    Sur la gauche de la photo, la mer continuait de déposer sur le rivage des guirlandes ocre rose.

    Au premier plan, sur la droite de la photo, le sable lui-même exhibait une multitude de particules teintées d'ocre rose.

    L'ocre à Ελαφονήσι – EΛΑΦΟΝΗΣΙ faisait émerger un magnifique décor propice à une sublime évasion.

    Ocre de la volupté d'une rêverie.

    Ocre d'un tendre bonheur.

    Ocre de l'opulence.

    Ocre de la générosité de la terre nourricière.

    Voici le spectacle qui nous était offert devant notre demeure à Ηράκλειο – HPAKΛEIO (en français : Héraklion), notre dernière halte :

     

    La Crète et son ocre

     

    La parure ocre orangé des dattes était éblouissante. Elle évoquait l'abondance des ressources et l'appétit de vivre.

    L'ocre crétoise se laissait savourer avec un exquis plaisir à travers l'oignon rouge et le chou, rouge aussi, à l'occasion d'une salade :

     

    La Crète et son ocre

     

    Ocre de la fraîcheur. Ocre d'une saveur exceptionnellement douce, nullement âpre, dans le cas de l'oignon rouge produit par le terroir crétois. Ocre d'un agréable craquant dans le cas du chou rouge, dont raffolaient tous les Crétois.

    Un condiment qui avait une place privilégiée sur la table crétoise était le piment :

     

    La Crète et son ocre

     

    Ocre rouge pour surprendre les papilles. Le Capitaine en faisait un abondant usage pour rehausser l'onctuosité de l'huile d'olive et le goût légèrement salé de la feta.

    Bien sûr, l'ocre de la mer a apporté sa contribution, indispensable et joyeuse :

     

    La Crète et son ocre

     

    Joie de la contribution, parce qu'avant d'enchanter la bouche, la croûte de sel charmait l'oreille en produisant avec une franche gaîté des crépitements au sein du wok.

    Ocre du raffinement, quand la mer livrait ses trésors :

     

    La Crète et son ocre

     

    Ocre de l'extase, grâce au corail qui se nichait sous la carapace, et plus particulièrement au niveau de la tête.

     

    La Crète et son ocre

     

    Pour parfumer la chair du crustacé, nous avons fait appel à l'ocre jaune du curcuma et à l'ocre rouge du piment.

    Ocre de la fête, qui nous a régalés à l'occasion des agapes de la Nativité, à Ηράκλειο – HPAKΛEIO :

     

    La Crète et son ocre

     

    De nouveau, l'ocre jaune et l'ocre rouge rivalisaient d'ingéniosité pour sublimer leurs fruits et créer une délicieuse harmonie en bouche.

    Nous sommes vivement reconnaissants à la Crète d'avoir nourri et notre corps et notre esprit avec son ocre aux mille visages et aux mille saveurs.

    Pin It

    votre commentaire


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique