• Une histoire de chaîne...

    NIDRI

    Entrée Nord du canal de LEFKAS : des voiliers franchissent le pont tournant.

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    A une époque, l'entrée Nord devait nous réserver quelques surprises !...

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    La vue depuis le bateau, au petit matin.

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    J'aurais pu finir comme ça ! Bon. J'exagère beaucoup. Mais ce matin, au départ, tout s'était bien passé. Oui, y'avait un petit vent de travers. Oui, j'étais pas vraiment, disons, pas très concentré. Oui, j'avais hâte de partir.

    NIDRI

    Comme d'habitude, au départ d'un quai où j'ai mouillé, je largue tout et je me hale sur la chaîne d'ancre. Sauf que là, le petit vent de travers ci-dessus nommé, m'a poussé vers les chaînes des autres bateaux. Mais qu'est ce qui m'a pris ? Il me suffisait de poursuivre ma remontée d'ancre. Mais non. Je ne sais pas pourquoi mais je suis retourné à la barre et j'ai donné un coup de marche arrière. Pourquoi ? Ça ne servait strictement à rien ! Et bien sur, devinez quoi ? Ben devinez alors !!! Faut vraiment que je fasse tout le travail moi ! Bon. Oui. J'ai enroulé la chaîne de mon voisin sur mon hélice ! Le moteur a calé immédiatement. Normal quoi. Bon. Y'avait pas trop de risque : j'étais maintenu par devant par mon ancre et, moins bien, par derrière par la chaîne de mon voisin.

     

    NIDRI

    Un clocher.

    Oui, je sais ça rien à voir avec ce que je vous raconte. Mais je fais ce que je veux !

    Bon. La suite me direz vous ? Non ? Tant pis, je vous la raconte quand même. Parce que je fais ce que je veux ! Alors il a fallu que je mette l'annexe à l'eau pour frapper une amarre sur le bateau au vent pour que, une fois dégagé (ce dont je ne doutais pas), je n'aille pas me mettre sur une autre chaîne... Il a fallu que je trouve mon masque de plongée que j'avais caché au fond d'un panier en osier !!! Il a fallu que j'enfile ma combinaison de plongée, parce qu'une eau à, disons une vingtaine de degré, c'est froid... Et il a fallu que je plonge pour me dégager de la chaîne. Ça a été facile. Heureusement.

    Une fois à bord, le moteur a bien voulu se remettre en marche. Je l'ai testé en marche avant et en marche arrière. Ça allait aussi. Alors j'ai fini de remonter mon ancre.

    BRAVO Pierre ! Belle manœuvre. Je suis quand même content, je m'en sors sans dégâts !

    NIDRI

    J'ai donc repris ma route. Poursuivre sur le canal de LEFKAS pendant un peu plus d'un mile.

    NIDRI

    C'est comme naviguer sur un fleuve. Avec, ici, une pensée pour Pierre et Caty qui ont sillonné les fleuves de France.

    NIDRI

    NIDRI. Au quai après avoir mouillé 60 mètres de chaîne... Et là encore, décidément c'est ma journée !, une fois quasi en place entre les 2 bateaux déjà au quai, ma chaîne se bloque ! Je suis trop court et la manille (grosse) du mouillage textile ne passe pas le guindeau ! Faut que je m'extirpe de la place, en flirtant, à nouveau, avec une chaîne d'ancre, pour débloquer la situation, et recommencer, avec succès cette fois là, la manœuvre.

     

    Vous voulez que je vous dise ? Ben c'est pas facile tous les jours !...

    La carte du parcours avec mes 2 escales à LEFKAS (Point jaune cerclé de rouge)

    Une histoire de chaîne...

     

     

    A bientôt.


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  • Commentaires

    1
    Vendredi 27 Mai 2016 à 16:13

    Ohlala, tu rencontres pas mal d'épaves! Tu pourrait bien mettre qqs unes sur Zéro la barre: http://zerolabarre.tumblr.com/post/120350058550/lefkas-canal-greece

    Au contraire, si tu rencontres un jolie bateau à vendre il faut advertir moi!

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    RP
    Samedi 28 Mai 2016 à 05:29

    "  Vous voulez que je vous dise ? Ben, c'est pas facile tous les jours ! ..."

    Capitaine, tu as bien fait de t'exclamer ainsi pour clore ta chronique du jour ! C'est pas facile tous les jours ! C'est pas reposant tous les jours ! C'est pas amusant tous les jours ! Constat clair et net, indiscutable, pour qui navigue. Naviguer, ce n'est pas s'amuser en mer, mais vivre en mer. Et la vie a ses contraintes ( à qui voulait écouter, tu as répété cinq fois : " il a fallu que..." ), ses contrariétés et ses désagréments, même loin de la terre ferme. Le croisiériste cherche la distraction à tout prix en mer, le navigateur cherche à être heureux au milieu des flots.

    " Je fais ce que je veux ! " T'as bien raison de t'écrier ainsi, Capitaine, à deux reprises même, car ça te soulage des émotions nouvelles causées par des chaînes si peu coopératives. Nouveautés dont tu te serais passé, mais nouveautés tout de même, fâcheuses mais instructives. Qu'y a-t-il de particulier dans l'esprit des lieux pour que tant de catastrophes s'enchaînent dans une même journée ? Ta chronique contient des indices qui permettent d'esquisser une explication.

    Tu es à Nύδρι – ΝΥΔΡΙ  , mais ta chronique parle encore de l'entrée Nord du canal de  Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ  , comme si tes yeux et ton esprit ne pouvaient consentir à se séparer de l'amont, du Golfe Ambracique qui est contigu, de la mer de sang où des milliers de cadavres servaient de marche-pied pour qu'Octave accède au titre d'empereur.

    Qui t'a incité à entreprendre ce regard nostalgique ? Qu'est-ce qui t'a poussé à amorcer cette rétrospective ? As-tu agi par pur instinct ? Étais-tu soudainement mû par un pressentiment ? Les épaves exposées sur les rives du canal et signalées dans l'introduction de ta chronique étaient comme des sentinelles qui montaient la garde dans le couloir de la mort.

    Octave aurait bien voulu contraindre la Reine d’Égypte  à emprunter un tel couloir, mais l'amirauté de la souveraine a su briser le blocus. Et la route de l'échappée ne pouvait que raser tout de suite le Nord de Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ  , car c'était le seul itinéraire autorisé par la sécurité. Il fallait éviter toute proximité avec l'Italie et filer en direction du Sud, Sud-Est pour être à domicile le plus rapidement possible.

    La clameur des milliers d'agonisants et la palpitation d'une amirauté en fuite pouvaient-elles ne pas laisser des traces dans le décor d'eaux et de roches ? La terre et les flots ont une mémoire, surtout pour des traumatismes aussi profonds.

    Marc-Antoine pris au piège à cause de la ruse d'Octave, la Reine d’Égypte a fui, par anticipation, les chaînes de l'esclavage et de l'humiliation qui l'attendraient dans le cortège triomphal du vainqueur. Mais a-t-elle pour autant rompu les chaînes qui la reliaient à son amoureux ?

    Nullement. Car lorsque celui-ci s'est donné la mort pour avoir échoué devant Alexandrie, elle a immortalisé les chaînes qui la liaient à lui jusque dans le Hadès. Iconographiquement, ces chaînes si puissantes qu'étaient celles de l'amour, étaient représentées par le frêle profil de l'aspic qui a inoculé le venin. A sa manière, la Reine d’Égypte disait au vainqueur romain : "Je fais ce que je veux, comme je veux ! "

     

     

    Ainsi a pris fin dans le sang et les larmes, un rêve d'empire. Mais pas seulement. A aussi pris fin un rêve d'amour total. Amour total entre une reine et un consul.

    Même île : Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ  . Autre point cardinal : le Sud et non plus le Nord. Même épreuve d'amour total, avec pour principal protagoniste, encore une illustre figure féminine, un esprit éminent de son temps, un être sublime, connu pour son âme raffinée et son art de la poésie.  Σαπφώ ΣΑΠΦΩ    était son nom.

    L'extrême pointe Sud de l'île servait de décor à une épreuve de saut dans la mer à partir d'une hauteur vertigineuse. L'issue de ce saut avait une valeur oraculaire. Son succès signifierait la viabilité des liens d'amour de l'instant, tandis que son échec traduirait leur infortune. 

    Σαπφώ ΣΑΠΦΩ  , la poétesse, qui était une créature si ravissante et talentueuse, a cru devoir elle aussi, interroger le saut de Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ  , suite à sa relation tumultueuse avec son amant. Comment un esprit aussi éclairé et brillant a-t-il pu accepter de se soumettre au verdict du précipice ? Comment un caractère aussi fort et indépendant a-t-il pu se laisser enchaîner par des liens d'amour aussi inextricables et prégnants ?

     

     

    En faisant son saut de Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ , la poétesse disait aussi : " Je fais ce que je veux ! ". Si le saut de Tibère, à Capri,  se déroulait sous la contrainte de la force, celui de  Λευκάς – ΛΕΥΚΑΣ  avait lieu par libre choix, par défi du destin, par quête d'absolu.

    Par narcissisme, les êtres d'exception croient volontiers que le sort leur réserve des mesures d'exception et des issues miraculeuses. Mais une réalité funeste attendait la poétesse au niveau de la mer, à la fin de la chute.

    L'énergie farouche avec laquelle l'on cherche à se défaire d'un amour, est exactement celle avec laquelle l'on s'enchaîne à l'idéal absolu de l'amour parfait. Chaînes maudites d'un côté, courtisées de l'autre.

    Le sens de l'existence résiderait-il dans cette lutte perpétuelle où l'être humain se débat avec les chaînes, non pas de l'amour, mais de l'exigence d'amour ?

    Lieux maudits ? Nullement ! Mais des lieux qui ont une mémoire, et qui ne la communiquent qu'au voyageur qui se montre réceptif et perméable.

      • Samedi 28 Mai 2016 à 07:08

        Grace à toi et à tes recherches et à ta façon romanesque d'écrire les choses, quand je viens lire tes commentaires, je me dis que la navigation en Grèce est réellement très belle. Plus que la gratuité des ports, plus que les paysages somptueux, plus que les ruines antiques (que je n'ai malheureusement pas beaucoup vu) et qui suggèrent l'Histoire, il y a tes narrations qui font que le passé devient presque présent ! C'est très agréable de voyager aux côtés de Marc Antoine, de Octave, Sapho ou Ulysse...

        Merci encore !



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