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Le balcon posé sur la mer (18) entre Πάρος et Σίφνος
Avant de regagner la pleine mer, le Zeph s’est assuré de la fiabilité de ses réserves. La priorité était toujours la même : celle de l’eau douce.
Il était prudent d’avoir les réservoirs remplis au maximun. C’est pourquoi nous avons fait un tour jusqu’à la borne d’eau avant de lever l’ancre.
Une surprise nous attendait à la borne d’eau : celle-ci était monopolisée par un garde-côtes qui l’utilisait pour rincer son embarcation de service.
Nous avons laissé l’officiel finir tranquillement sa tâche de nettoyage.
Puis nous avons pris la relève, non sans déplorer le froid comportement du Grec. L’uniforme recommandait sans doute la rigueur, qui a dévié pour devenir de la froideur.
De la part du Grec, il n’y avait pas d’expression de sympathie, mais pas de geste d’hostilité non plus.
Alors, tranquillement, nous avons fait le plein d’eau douce.
Pour éviter les déchirements musculaires, surtout au niveau de l’abdomen, nous avons fractionné la charge à porter entre la borne d’eau et l’annexe. C’est le Capitaine qui effectuait, à la fin, le remplissage intégral des contenants, dans l’annexe elle-même :
Après le plein d’eau douce, le Zeph était prêt à quitter Πάρος (transcription : Paros) pour s’en aller à Σίφνος (transcription : Sifnos).
Le Zeph était très content de l’escale à Πάρος. Mais à présent, il sentait que le καιρός était parti ailleurs. Regardez comme le Zeph était impatient de s’en aller pour rejoindre le καιρός :
Puis est venue l’heure de soulever l’ancre :
La vase qui venait avec l’ancre n’inspirait aucune répulsion. Au contraire, elle charmait le regard parce qu’elle était la justification d’une confiance qui apportait la sérénité du repos nocturne et de toute la journée.
Empli de bonheur, le Zeph s’en allait vers d’autres horizons :
Ce bonheur, réel, enivrant et inoubliable, ne dépendait pas de l’accumulation des miles nautiques mais de la saveur exquise des instants offerts par la clémence des divinités.
Toutes les voiles étaient hissées pour voguer allègrement, à la manière des Anciens :
Sentir que la poussée du vent était la seule force motrice procurait un immense plaisir.
Le Zeph glissait joyeusement sur le corps velouté de l’azur des profondeurs.
L’harmonie des choses était une très belle récompense de la patience.
À plusieurs reprises, le Capitaine disait que l’instant était magique.
En fait, la magie n’avait pas que des habits de lumière.
Sur notre route, l’envoûtement est aussi venu par la pénombre, qui a créé des paysages homériques.
Regardez ce relief dentelé qui surgissait de la mer :
On pourrait y voir une main tourmentée qui cherchait désespérément à se hisser hors de l’eau. Ce serait la main d’un compagnon d’Ulysse, qui a trouvé la mort dans une noyade.
La masse rocheuse présentait une courbure. Si l’on associe à celle-ci une trajectoire qui n’est plus ascendante mais descendante, on pourrait y voir la chute des blocs de pierre que lançait Le Cyclope contre les mortels qui venaient de lui crever l’unique œil.
Le voile nuageux qui commençait à s’étendre accentuait le caractère mystérieux du phénomène géologique.
Au fur et à mesure que le Zeph s’approchait de la destination finale du jour, la pénombre s’assombrissait de plus en plus. Nous avions alors la sensation d’emprunter le chemin réservé aux initiés, lequel chemin devait conduire ceux-ci à l’endroit le plus sacré.
Voici ce qui nous attendait à l’horizon :
Entre deux promontoires, se profilait un passage qui s’enfonçait vers la droite de la photo. C’était ce chemin que le Zeph devrait emprunter.
La brume qui enveloppait le site évoquait le dernier trajet d’Ulysse avant le débarquement à Ithaque. En effet, le sommeil dans lequel Ulysse était plongé rendait la route indiscernable pour le héros grec, qui n’a ouvert les yeux, c’est-à-dire qui n’a vu clair, qu’une fois débarqué sur le sol natal.
L’analogie de la clarté visuelle entravée puis restaurée au moment de toucher terre conférait à ce dernier tronçon de la route du Zeph une parenté incroyable avec l’expérience ulysséenne.
En effet, juste avant de s’engager dans le passage qui se faufilait entre les deux promontoires, le Zeph a vu la clarté diurne croître de nouveau.
Les yeux du Zeph se sont dessillés pour constater qu’ils se trouvaient dans la baie de Βαθύ (transcription : Vathi), sur l’île de Σίφνος (transcription : Sifnos).
L’émergence du sens provenait de l’alchimie entre la disponibilité du décor et l’imagination créatrice du voyageur.
L’ambiance homérique de l’arrivée a donné un cachet particulier à la soirée.
Nous avons fêté le mouillage avec le vin rouge que le Tallulah nous avait offert la veille :
Il s’agissait du Μπουτάρη – ΜΠΟΥΤΑΡΗ (transcription : Boutari), produit à Νάουσσα (transcription : Naoussa), dans le Nord de Πάρος.
Ce breuvage de l’amitié nous permettait de rester dans le fastueux sillage des agapes de la veille, à Πάρος.
Pour accompagner le délicieux Μπουτάρη offert par le Tallulah, il y avait l’aneth frais, le concombre cru et le chou cru.
La pleine lune a égayé l’onde avec des reflets d’argent :
La photo illustre le pas de deux qui unissait la lune et le feu de mât du catamaran situé devant la proue du Zeph. La partenaire conviée par la Nature avait comme parure le chatoiement de l’argent tandis que le partenaire présenté par le savoir des humains s’exhibait avec des reflets d’or.
Le balcon posé sur la mer entre Πάρος et Σίφνος était un balcon onirique.
Tags : balcon posé sur la mer, Πάρος, Σίφνος, Homère, Μπουτάρη, Νάουσσα, aneth, pleine lune, onirique
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