• L'horizon du berger

    L’évocation de l’horizon est habituellement associée au souhait de pouvoir l’étendre, qui traduit le désir d’évasion et de liberté.

    Il existe une situation où l’horizon qui fait l’objet d’un vœu n’est pas considéré par rapport à son extensibilité. En effet, dans ce cas, il n’est pas une ligne ouverte aux deux extrémités, mais une ligne fermée qui circonscrit un territoire promis à la sécurité. Il s’agit de l’enclos derrière lequel le berger met son troupeau à l’abri.

    Voici un enclos de berger :

     

    L'horizon du berger

     

    Nous sommes à Πάτμος – ΠΑΤΜΟΣ (en français : Patmos), l’île où l’apôtre Jean a rédigé le dernier livre des Écritures grecques chrétiennes.

    L’enclos, qui est un assemblage de murets de pierre, de palettes de bois et de grillages métalliques, se trouve sur la route qui mène du port appelé Σκάλα – ΣΚΑΛΑ (en français : Skala) au Grand Monastère dédié à l’apôtre Jean.

    L’enclos se place en hauteur en s’adossant au flanc d’une colline. En l’occurrence, il regarde vers l’Est.

    Voici des pensionnaires de l’enclos en train de regarder vers l’Est aussi, au moment où se soleil se lève :

     

    L'horizon du berger

     

    Juste en face, le disque solaire vient d’émerger au-dessus de la chaîne de montagne qui s’étire à l’horizon.

     

    L'horizon du berger

     

    La masse aqueuse, par effet de contraste, se vêt d’un bleu foncé.

    Tout comme les créatures dont il a la charge, le berger assiste au lever du soleil, mais son horizon n’a pas le temps de faire du charme malgré la lumière irisée. À la place, le sens des responsabilités développe un horizon plus pragmatique et plus proche, qui se consacre prioritairement au bien-être du troupeau.

    L’horizon du berger est un horizon de dévouement.

    C’est pourquoi, dès l’Antiquité, le berger sert de modèle à toute personne qui a la charge d’un groupe d’humains.

    À Πάτμος – ΠΑΤΜΟΣ encore, il nous a été donné de connaître l’heureuse conséquence de cette transposition.

    Voici le Zeph qui vient de s’amarrer au quai municipal de Πάτμος – ΠΑΤΜΟΣ :

     

    L'horizon du berger

     

    En dehors du nom écrit sur la poupe, le Zeph est reconnaissable par son éolienne tricolore.

    La photo ne montre pas l’esthétique du Zeph, mais sa physiologie, en exhibant ses besoins en eau potable. Au premier plan, les deux seaux noirs et les deux seaux bleus sont à nous. Tout de suite après l’amarrage, c’est l’approvisionnement en eau douce qui occupe le devant de la scène.

    En prolongeant l’axe qui va de la proue à la poupe du Zeph, on tombe sur un bercail, identifié par un panneau. Voici la pancarte d’identification :

     

    L'horizon du berger

     

    Les lettres sont lues derrière une vitre qui réfléchit en même temps le quai d’amarrage.

    En caractères noirs, sur un fond doré, apparaissent les lignes suivantes :

    ENOPIA АПОΣΤΟΛΟΥ ΘΩΜΑ

    ΠΑΡΕΚΚΛΗΣIΟΝ ΑΓ. ΦΑΝΟΥΡΙΟΥ

    ΕΦΗΜΕΡΙΟΣ

    Π. ΓΡΗΓΟΡΙΟΣ ΣΕΛΙΑΝΙΤΗΣ

    6974 143 472

     

    En français :

    PAROISSE DE L’APÔTRE THOMAS

    CHAPELLE DE SAINT FANOURIOS

    CURÉ

    DOYEN GRÉGOIRE SÉLIANITIS

    6974 143 472

     

    Un nom est apposé sur l’enclos : c’est celui de l’apôtre Thomas.

    Le nom du berger est aussi explicité : c’est Grégoire, pour les intimes.

    Et le mousse n’a pas tardé à faire partie de la sphère des intimes de Grégoire.

    Des horizons de plus en plus resserrés ont spontanément organisé la rencontre avec le berger.

    Voici l’horizon du premier face à face :

     

    L'horizon du berger

     

    C’est ce que voit le berger, à partir de l’iconostase.

    Il voit que vers les sièges du fond, se tient une silhouette venue de l’Asie.

    Cette nouveauté à l’horizon l’intrigue, d’autant plus qu’elle se meut librement au milieu des trésors de l’art byzantin dès que l’office est fini.

    Une brebis grecque, qui a fait ses études à la Sorbonne, remarque l’inscription française sur le sac de courses que porte le visiteur venu de l’Asie. Aussitôt, elle se propose de lui servir de guide, en français. Le visiteur accepte la proposition. Il apprend que la porte qui est à gauche quand on regarde l’iconostase est toujours consacrée à l’archange Michel et que c’est par cette porte que transite le berger quand il quitte l’autel pour rejoindre l’assemblée des brebis.

    Dans la photo suivante, la brebis grecque qui offre sa médiation se trouve à droite :

     

    L'horizon du berger

     

    La brebis qui fait œuvre d’initiation capte dans son horizon quelques repères de francophonie et son cœur bienveillant se saisit de l’occasion pour apporter au visiteur le confort de la compréhension.

    Le nom de cette brebis est Σοφία – ΣΟΦΙΑ, qui signifie littéralement « sagesse ».

    Ainsi Σοφία rapproche le mousse de la porte qui relie le Ciel à la Terre. Devant cette porte, se tient, à ce moment-là, le berger.

     

    L'horizon du berger

     

    Le berger porte son costume de lumière. Devant lui, dans un récipient cylindrique recouvert d’un linge brodé, est déposé du pain que le berger vient de bénir.

    Σοφία fait les présentations.

    Le berger et le mousse en sortent enchantés.

    Du berger, le mousse obtient très facilement l’autorisation de réaliser un portrait.

    Par décence, le berger dit : « Comme ça ? » en désignant le vêtement de la simplicité, parce qu’il vient d’enlever la tunique d’apparat.

    Immédiatement, le mousse lui répond avec le sourire : « Oui, comme ça ! »

    Le berger confirme sa disponibilité. Voici le portrait de la simplicité :

     

    L'horizon du berger

     

    À cet instant, le mousse prend conscience qu’il occupe tout l’horizon du berger.

    L’horizon de la fascination devient l’horizon de la générosité : le berger accorde au mousse tout le temps nécessaire pour choisir l’horizon du cadrage dans des vues rapprochées.

     

    L'horizon du berger

     

    L’art de Byzance n’en est que plus magique !

    La passion du mousse pour l’esthétique byzantine fait vibrer l’horizon émotionnel du berger. Celui-ci propose au visiteur d’aller boire ensemble un café dans le bar d’à côté.

    L’horizon liturgique cède la place à un horizon de convivialité, avec le charme de la vie de tous les jours.

    C’est Σοφία qui fait la photo-souvenir du café après la liturgie :

     

    L'horizon du berger

     

    Le berger porte des vêtements qui lui rappellent son devoir de modestie. Cela n’empêche pas une joie sincère d’illuminer son horizon physique et spirituel.

    C’est encore Σοφία qui informe le mousse qu’il n’a rien à débourser pour le café parce que celui-ci est pris en charge par le berger.

    Cette prise en charge a lieu de façon très discrète. L’horizon du berger est un horizon d’élégance.

    L’horizon de Σοφία aussi est rempli d’élégance. À cette occasion, le mousse réalise un portrait de Σοφία et c’est ce portrait qui est montré ci-dessus.

    L’élégance ne peut se passer de la connaissance spirituelle. C’est pourquoi le mousse demande au berger de l’aider à comprendre les inscriptions qui n’ont pas été déchiffrées. Le berger accepte tout de suite de fournir cette aide. Seulement le mousse a peur qu’un départ anticipé du Zeph ne fasse rater la source de lumière. Alors le mousse fixe le rendez-vous au lendemain matin, ignorant que le berger est déjà sollicité par d’autres activités, ce matin-là. Mais celui-ci se ravise et trouve pour son nouvel ami un créneau à partir de onze heures.

    C’est la bienveillance qui rend l’horizon du berger conciliant.

    Le berger est un homme de ponctualité.

    Le voici, le lendemain, à onze heures :

     

    L'horizon du berger

     

    En vrai berger, il nourrit son horizon de fraîcheur.

    Le jardin où il attend son nouvel ami appartient à la chapelle et au cimetière attenant : l’horizon du berger est un horizon de consolation et d’espérance.

    Au milieu des effluves suaves qui parfument la quiétude, le berger livre à son ami les subtilités de la langue byzantine.

     

    L'horizon du berger

     

    Quel délicieux moment d’échange !

    L’horizon de l’amitié est faite de réciprocité.

    Afin de remercier le berger pour son café de bienvenue, le mousse apporte à l’homme de bonté du riz avec une garniture de légumes.

     

    L'horizon du berger

     

    Le riz de la gratitude est présenté dans une boîte rectangulaire qui a 18 cm en longueur, 12 cm en largeur et 6 cm en profondeur.

    En tendant la boîte au berger, le mousse lui dit :

    “Eίναι ρύζι με τζίντζερ.”

     

    En français :

    « C’est du riz avec du gingembre. »

    En raison des dimensions de la boîte, l’horizon du berger n’excède pas 18 cm à ce moment-là. Malgré l’étroitesse de cet horizon, le berger y trouve de la valeur. Car il s’écrie, non sans joie :

    “Kουνουπίδι !”

     

    En français :

    « Chou-fleur ! »

     

    L’horizon du berger de Πάτμος est un horizon hédoniste.

    Près du banc où le berger a permis à l’horizon de son nouvel ami de s’élargir en rapport avec le savoir byzantin, on peut voir ceci :

     

    L'horizon du berger

     

    Dans la brillance du marbre, se reflète un ange agenouillé.

    C’est aussi l’illustration du fait que l’horizon de bonté du berger le rend doublement attachant, dans ce qui est apparent aussi bien que dans ce qui est sous-jacent.

    Un voyageur rêve souvent d’embrasser l’horizon.

    Le Zeph, lui, rêve que ce soit l’horizon qui l’embrasse. Au cours de la récente navigation, ce rêve du Zeph s’est réalisé à maintes reprises. L’étreinte de cet horizon de la sollicitude, qui est celui du berger spirituel, apporte du réconfort et donne sens au voyage.

     


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