• L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

    Alors que l’année 2023 était sur le point de s’achever, la narration du chemin de l’hospitalité anatolienne atteignait la position la plus à l’Est, qui était Doğubayazit. Avec l’arrivée de l’An neuf, le récit a amorcé un virage en faisant passer la route du retour par la Mer Noire. Au Nord-Ouest de Doğubayazit, il y avait Kars, la « Mariée ». Un peu plus au Nord encore, on s’est retrouvé au bord de la Mer Noire, au pays de la Toison d’or.

    Jadis, pour faire valoir son droit à hériter le trône paternel, Jason devait remettre à l’usurpateur de celui-ci la Toison d’or. D’où le voyage à bord de l’Argo, depuis le Golfe de Bόλος – ΒΟΛΟΣ (en français : Volos) jusqu’à la contrée que les Grecs appelaient Κολχίς – KOΛΧΙΣ (en français : Colchide).

    Notre première halte au bord de la Mer Noire était en Colchide.

    Le marbre omniprésent de la demeure qui nous accueillait rappelait le palais de la maison royale qui avait offert l’hospitalité à Jason.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Nous avions du marbre dans l’espace public mais aussi dans l’espace privé.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    La salle d’eau était tapissée de marbre du sol jusqu’au plafond, et sur les quatre murs.

    Ce décor de prestige était très impressionnant.

    Plaisait-il ? On ne pouvait pas dire qu’il était laid. Il avait du caractère. En tous cas, il n’était pas innocent. En effet, observez bien ce miroir qu’offraient la symétrie de la composition et l’incidence des rayons lumineux de l’instant :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Une créature et son double nous surveillaient.

    Ce n’était pas de la suspicion. C’était plutôt de la vigilance.

    Ce hasard des artefacts nous ramenait à l’expédition de Jason, qui n’était pas venu en Colchide avec de très pures intentions. La Toison d’or a été tout simplement volée par le voyageur qui venait d’arriver et qui a fui dès qu’il a mis la main sur l’objet convoité.

    À la Toison, le métal doré avait conféré un attrait irrésistible.

    De nos jours, la Colchide continuait de chérir le faste de l’or.

    Voici comment l’art du raffinement se dévoilait dans les orfèvreries du XXIè siècle pour séduire le voyageur :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    La marguerite avait deux contours : le contour circulaire, qui était la forme classique, et le contour ovale, qui cherchait à introduire la dynamique de l’étirement.

    Dans cette présentation, l’orfèvre a confié à la forme classique la position de la stabilité tandis l’ovale s’épanouissait tout en haut, à la manière d’une flamme, qui était la flamme du désir.

    La transition entre les deux contours était assurée par une acanthe à lobes spiralés. Mais ici, l’acanthe était renversée, ce qui faisait que les lobes spiralés ressemblaient aux tentacules d’un poulpe. Ainsi, l’univers marin a été subtilement introduit dans ce magnifique tableau de la magie de l’or, pour rappeler que nous étions au bord de la Mer Noire.

    L’or est magnifié par la création artistique. Mais intrinsèquement, il possède une immense capacité d’envoûtement, car il symbolise un double pouvoir, qui est le pouvoir sur les humains et sur le temps. Le pouvoir sur les humains, c’est le pouvoir politique de l’ici-et-maintenant tandis que le pouvoir sur le temps correspond à un rêve d’éternité.

    Aux personnes éprises de la nature intrinsèque du métal doré, l’orfèvre de la Colchide proposait directement des lingots massifs :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Le poinçon apposé sur les lingots de cette vitrine indiquait que l’or de la Colchide était disponible avec une pureté de 995,0 pour mille. Dans cette présentation, le décorateur a pris soin de conjuguer deux attraits : celui du métal doré et celui de l’ambre.

    Des colliers confectionnés avec l’ambre rouge s’étiraient lascivement entre d’autres bijoux en or.

    Pour mener à bien sa mission, Jason a bénéficié de l’aide de la fille du roi de Colchide.

    Μήδεια – MHΔΕΙΑ (en français : Médée) était le nom de la princesse.

    Médée a eu le coup de foudre pour Jason.

    Ce cœur finement ouvragé pourrait illustrer l’élan passionnel que Médée avait ressenti pour le voyageur princier :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Le cœur en or de Médée a donné lieu à des actes extrêmement téméraires de la part de celle-ci afin de faire aboutir coûte que coûte les projets de son amoureux.

    La Toison, avant qu’elle ne soit volée, faisait la renommée de la Colchide. De nos jours, c’est la culture du thé qui constituait la fierté de notre halte en Colchide.

    L’urbanisme urbain célébrait partout la feuille de thé. Sur ce pavement de l’espace public, elle était stylisée pour s’associer aux vagues de la frise grecque :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Dans la couronne contiguë à la frise des vagues, les feuilles de thé étaient disposées en s’inspirant du schéma du décagone. Quant au disque central, il était structuré par un hexagone, dont les six feuilles de thé, rassemblées par paires, présentaient des courbures qui faisaient écho à celles des vagues.

    Un somptueux musée était consacré à la feuille de thé en raison de l’énorme chiffre d’affaires que celle-ci rapportait à l’économie locale. Voici la signalisation qui indiquait l’emplacement de ce musée :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Le décorateur a voulu faire ressortir davantage la feuille de thé en plaçant celle-ci devant la destination finale, qui était la tasse à thé. Les innombrables bienfaits de la plante étaient évoqués par le gigantisme de la tasse de thé.

    Pour la municipalité locale, l’érection de la feuille de thé comme emblème de la prospérité économique équivaudrait à la suspension de la Toison d’or en haut du chêne sacré.

    De nos jours, l’administration a mis en valeur le cordon ombilical qui reliait le centre historique des échanges et le lieu de célébration des nouvelles ressources du terroir. Décoré par une profusion d’arcades qui s’illuminaient à la tombée de la nuit, ce cordon ombilical devenait une sorte de Voie Royale que nous empruntions avec délectation.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Contrairement à son homologue de l’Antiquité, le chemin qui menait au trésor du XXIè siècle n’était ni piégé, ni dangereux.

    Jadis, la Toison d’or était gardée par un dragon qui ne fermait jamais l’œil.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    De nos jours, l’éclairage de la tasse de thé géante évoquait aussi l’éveil permanent. En effet, le maillage lumineux qui enveloppait avec des lignes blanches et rouges la tasse géante ne cessait de se dilater en tournoyant.

    Au niveau du col, une ligne verte simulait même le battement de la paupière :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Cette joyeuse activité lumineuse était destinée à séduire le visiteur tandis que le dragon avait pour but d’effrayer celui-ci. La Colchide du XXIè siècle promouvait des relations de confiance envers le visiteur tandis que la Colchide de l’Antiquité entretenait des relations de défiance envers la personne qui était de passage. Et cette méfiance n’était pas de trop avec l’arrivée de Jason, le prince qui s’est résolu à voler, puisqu’il n’a pas pu conquérir.

    C’était Médée qui a eu recours à ses connaissances en pharmacologie pour endormir le dragon et le rendre inoffensif.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Sans les herbes narcotiques de Médée l’amoureuse, le vol aurait été impossible.

    Nous n’avions pas les mauvaises intentions de Jason.

    Le cœur pur et l’esprit enchanté, nous nous sommes approchés de la base de la tasse géante.

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    Nous n’avions rien à craindre car nous étions respectueux des biens qui faisaient la fierté de la Colchide du XXIè siècle.

    En paix, nous avons quitté le lieu de célébration et nous avons regagné le centre historique :

     

    L'hospitalité du pays de la Toison d’Or

     

    En conservant sa bonne humeur, la tasse géante nous a regardé repartir dans la dignité.

    Dans la langue de l’Anatolie du XXIè siècle, notre halte en Colchide s’appelait Rize.

    À Rize, nous avons fait la connaissance d’un groupe d’amis, dont le passe-temps favori était la pêche en bateau. Avec beaucoup de gentillesse, ils nous ont offert le thé, puis le « börek » au fromage. L’un d’eux nous a dit, avec un charmant sourire : « Nous n’avons pas pu venir jusqu’à vous, merci à vous d’être venus jusqu’à nous ! »

    Quelle déclaration émouvante !

    L’Anatolien faisait l’éloge de la contribution du visiteur. Ainsi l’hospitalité n’est pas un geste unilatéral, mais une construction commune.

    L’Anatolien sous-entendait que la rencontre était une chose belle et nécessaire. Autrement dit, l’hospitalité participe au plaisir de s’ouvrir à autrui.

    Enfin, la complémentarité que soulignait l’Anatolien ne pouvait venir à l’existence que grâce à des égards mutuels. En d’autres mots, l’hospitalité s’accommode mal avec la duperie ou le vol, qui ont entaché la conduite de Jason.

    Sur la photo suivante, faite au pays de la Toison d’or, l’Anatolien qui définissait l’hospitalité comme une convergence de sensibilités désintéressées se trouvait sur la droite.

     

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