La calanque, non pas de Cassis, mais de Méjean.
Non pas à l’Est, mais à l’Ouest de Massalia.
Route phocéenne tout de même, non pas des colons qui s’en retournent en Ionie, vers la cité-mère, mais d’un de ses fils les plus illustres : Pythéas, qui ne craint pas de franchir les colonnes d’Héraklès.
La calanque, et non les calanques. Pas de pluriel qui induit une énumération superficielle, mais le singulier pour dire l’absence de concurrence, une qualité inégalable.
Le visage de la calanque de Méjean est celui d’un joyau grec, plus exactement, crétois, qui se nomme Λουτρό – ΛΟΥΤΡΟ.
Visage de la simplicité, du bel ordonnancement, de l’harmonie.
Ce fut la Grèce avec les ferrys, les sacs à dos et les chaussures de marche. Plusieurs décennies après, le souvenir de la fascination demeure intact.
Visage de l’île des Minoens, mais aussi visage de l’archipel des Rhodiens, en particulier, de Κάρπαθος – ΚΑΡΠΑΘΟΣ.
Un ferry par semaine en partance du Pirée, au printemps. Pour plus de souplesse et de mobilité, on se voyait dans l’obligation de programmer la visite en été et de renoncer ainsi à voir l’île avec les fleurs du renouveau.
Mais Κάρπαθος – ΚΑΡΠΑΘΟΣ en été, avec seulement les pins verdoyants et l’onde bleue, c’est encore fabuleux. Le visage de la calanque de Méjean reflète avec générosité la beauté sauvage de Κάρπαθος – ΚΑΡΠΑΘΟΣ. Jugez-en plutôt.
Tout ça à la calanque de Méjean ? Oui, tout ça à la calanque de Méjean, avec en prime, l’expérience du récent voyage initiatique. Pas seulement la réalisation in situ, mais le prélude aussi, sans oublier l’épilogue, au souffle wagnérien.
Visage d’anfractuosité, non par défiance ou par malveillance, mais par souci de coquetterie.
Visage de l’été en automne. Visage de l’été indien, comme lorsque le Zeph s’est lancé plein de confiance vers l’Hellade.
Communion avec la nature prospère, les éléments en paix.
Visage parfumé grâce à la résine capiteuse des conifères et à mille autres plantes odorantes qui surgissent de la roche blanche.
Visage du plaisir des mouillages.
Visage de la jouissance du privilège, de la liberté exaltée.
Mais aussi, visage du destin de la solitude.
Visage homérique, enchanteur et inévitable.
Visage du pouvoir de fascination de l’entre-deux. Enchantement de la jonction entre l’espace de la mouvance et celui de la stabilité.
Visage de la clémence du mistral. Avant la balade, le mistral a soufflé jusqu’à 50 km/h. Le Zeph, chatouillé sur ses bers, émettait des craquements qui inquiétaient le capitaine. Après la randonnée, pendant que cet article était en gestation, Météo France annonçait des rafales jusqu’à une centaine de km/h. La balade dans la calanque de Méjean a eu lieu au cours de l’accalmie qui séparait les deux déchaînements.
Le visage de la calanque de Méjean est celui du plaisir retrouvé, ravivé et amplifié.
C’est le visage d’une douce plénitude, du splendide bonheur δημοτικό – ΔΗΜΟΤΙΚΟ.