Le week-end dernier, le Zeph a rendu visite à l’Aventy au QG de celui-ci. Car le Zeph n’a pas oublié que leur amitié était l’une des plus belles choses qui soient arrivées au cours du voyage initiatique.
Le Zeph se souvient qu'il a rencontré l'Aventy à Camerota, en Mer Tyrhénienne. L'éolienne qui se dresse au QG de l'Aventy rappelle au Zeph que le lien amical avec l'Aventy est un cadeau de la mer.
Le Zeph se souvient de la conscience écologique qui a présidé à la conception et à la réalisation de l'Aventy.
Corollaire de cette attitude respectueuse à l'égard de l'environnement : l'extrême discrétion de l'Aventy dans ses mouvements. Objectif : zéro décibel pendant toutes les manœuvres.
Le mousse se souvient à quel point il était fasciné par la personnalité de l'Aventy, dès les premiers instants de la rencontre. L'émotion a incité le mousse à rendre hommage à l'Aventy en ces termes :
« Ils savent occuper l'espace avec bienséance, respecter la sérénité des lieux, rester discrets dans leurs va-et-vient avec leur embarcation. Quand un savoir-faire débouche avec tant de talent et de sagesse sur un savoir-être, l'homo faber devient tout simplement homo perfectus ! »
Ces lignes sont extraites d'un commentaire rédigé pour l'article « De Maratea à Cetraro », publié le 2 avril 2016.
Se souvenir pour savourer à nouveau.
Le Zeph se souvient que l'Aventy a toujours été de bon conseil pour résoudre les problèmes techniques liés à la navigation. Avec générosité, l'Aventy joint le geste de l'entraide à la parole éclairante.
Voici dans quel état le Zeph a fini sa navigation à l’automne dernier :
La photo a été prise au large de Καβαλλιανή – KABAΛΛIANH (en français : Kavalliani), qui était la dernière île explorée avant de rejoindre le port d’attache.
Sans être éventré, le Zeph présentait de nombreuses béances, qui étaient autant de stigmates causés par l’aventure sur les flots de l’Égée.
Sur la photo, la déchirure de la capote se reflète sur le hublot qui coiffe la cabine du mousse. L’effet miroir montre que le dégât n’est pas seulement d’ordre esthétique. L’âme du Zeph en a été très affectée.
Le week-end dernier, le Zeph s'est adressé à l'Aventy pour la réparation de la capote, mais aussi du bimini et du lazy-bag.
Dans le cas présent, c'est l'Aventy qui manifeste sa volonté de se souvenir du Zeph.
En effet, l’Aventy est en pleine mutation technologique. Malgré un emploi du temps extrêment chargé, il parvient à trouver du temps pour le Zeph, pour conseiller celui-ci, le guider dans la recherche des solutions, non seulement théoriques mais aussi pratiques.
La volonté s'exprime par des efforts conscients et convergents.
Plus la volonté est forte, plus le souvenir édifie le présent.
Le mérite de l'Aventy est illustré par la photo suivante :
Du givre se dépose sur les cyclamens qui fleurissent à l'extrémité Est du jardin de l'Aventy.
William Shakespeare décrit le contexte de l'apparition de ces cristaux de glace. Sous sa plume, nous pouvons lire ceci :
“ Why, what's the matter,
That you have such a February face,
So full of frost, of storm and cloudiness ? ”
– William Shakespeare. Much Ado About Nothing, Act 5, Scene 4.
En français :
“ Pourquoi, qu'y a-t-il,
Que tu aies un tel visage de février,
Si plein de givre, d'orage et de nébulosité ? ”
– William Shakespeare. Beaucoup de bruit pour rien, Acte 5, Scène 4.
La photo est faite le week-end dernier, en plein mois de février.
Dans le cadre de cet article, c'est la conjoncture actuelle qui présente « un visage de février ». C'est un visage affreux, parce qu'il est « si plein de givre, d'orage et de nébulosité ». Dans l'évocation de William Shakespeare, le givre est associé à deux autres phénomènes qui sont désagréables, voire déstabilisants.
Pour le dramaturge anglais, le givre pourrait avoir la violence d'un orage et rendre les choses maussades à l'instar de la nébulosité.
Violence et morosité sont bien deux facettes du climat social actuel.
Il n'est pas inintéressant de joindre à la vision de William Shakespeare celle de Marcel Proust, qui écrit :
“ le printemps de Combray qui piquait encore aigrement avec toutes les aiguilles du givre ”
– Marcel Proust. Du côté de chez Swann, 1913
Le romancier français précise la forme des cristaux de glace : ils sont comme des aiguilles. Leur forme effilée n'est pas innocente, puisqu'elle est associée à l'action de « piquer ». On retrouve là l'idée de violence qu'a avancée William Shakespeare. Marcel Proust donne une précision supplémentaire en parlant de l'aigreur de la piqûre, qui est une sensation extrêmement pénible.
Ainsi le givre dépeint par William Shakespeare et par Marcel Proust n'a rien de charmant. Au contraire, les « aiguilles » de givre se réfèrent aux douleurs, physiques ou morales, inhérentes à la condition humaine. Et malgré l'actuelle aggravation de ces douleurs, l'Aventy trouve du temps et de la bonne humeur pour prêter une main secourable au Zeph.
La volonté de se souvenir du lien amical engendre le dévouement de l'Aventy.
Le Zeph a tenu à mériter ce dévouement. De sa traversée de l'Italie, il a ramené des carrés magiques, dont raffole l'Aventy. L'Italie les publie dans un magazine intitulé Sudoku.
À l'aller et au retour, le Zeph a pensé à faire plaisir à l'Aventy.
Voici les exemplaires que le Zeph a achetés pour l'Aventy sur le chemin de l'aller :
Il y avait une édition hebdomadaire et une édition mensuelle. La revue mensuelle avait un titre bleu. À droite de ce titre, était écrit « MARZO » (en français : MARS). Quant à la revue hebdomadaire, elle avait un titre vert. À gauche de ce titre, figurait la date : « 25 marzo 2022 » (en français : 25 mars 2022).
Et le 25 mars 2022, c'était le jour où nous avons pris le ferry à Ancône pour traverser l'Adriatique en direction de la Grèce.
Nous avons acheté les deux exemplaires de Sudoku à l'entrée d'Ancône.
À l'horizon, la colline boisée qui s'avançait le plus vers la mer en dominant les installations portuaires était couronnée par l'acropole qu'avaient érigée des colons syracusains, qui étaient eux-mêmes des descendants de colons corinthiens.
Ainsi, nous avons gagné le rivage grec avec la volonté de nous souvenir de l'amitié avec l'Aventy.
La même volonté nous a habités sur le chemin du retour. Voici les exemplaires de Sudoku que nous avons achetés pour l'Aventy avant de quitter l'Italie pour rentrer en France :
La revue mensuelle (MENSE) était estampillée « NOVEMBRE » à droite du titre rouge.
Les deux autres revues correspondaient à des éditions hebdomadaires (SETTIMANA). Au-dessus du titre vert, la date était : 1 dicembre 2022. À gauche du titre rouge, figurait la date : 2 dicembre 2022.
Nous avons traversé la frontière le 1er décembre, dans l'après-midi.
Autrement dit, l'édition hebdomadaire avec le titre rouge a pris de l'avance par rapport au lendemain.
Nous avons acheté ces trois revues à Ventimiglia.
À Ventimiglia, nous avons aussi fait le plein d'essence, sous le regard nostalgique d'un pin parasol.
Ainsi nous sommes revenus dans l'Hexagone, heureux d'avoir cultivé la volonté de nous souvenir du lien amical avec l'Aventy.
De joyeuses retrouvailles viennent de célébrer la volonté de se souvenir mutuellement.
Le mousse a eu le privilège d'élaborer certains menus.
Grande a été sa joie quand il avait entre ses mains des ustensiles authentiques.
Pour la découpe, il avait à sa disposition un tranchant divinement affûté :
La dernière fois qu'il éprouvait ce plaisir de couper aussi fin, c'était quand il secondait la figure maternelle.
Pour la cuisson, il maniait des casseroles à l'apparence rustique :
Le couteau affilé et la casserole pittoresque lui rappelaient ses jeunes années en Indochine. Car la volonté de se souvenir de ses origines ne s'estompe pas avec l'âge, loin de là.
Parmi les enseignements reçus jadis, il y a celui d'honorer l'hospitalité offerte.
C'est pourquoi le mousse s'est appliqué pour offrir à l'Aventy une assiette qui réveille les sens et ravit les papilles :
Il s'agissait de porc caramélisé par une cuisson lente et accompagné de mangue rôtie à la cannelle.
L'assemble des gourmets était conquise.
La volonté de se souvenir de ces merveilleux instants de convivialité a produit la photo-souvenir suivante :
Pour l'au revoir, l'Aventy nous a donné de la mâche cueillie directement dans son jardin:
L'Aventy se souvient que nous aimons beaucoup les crudités.
Pour donner du peps, l'Aventy a mis aussi de la roquette :
L'Aventy a bien fait d'ajouter à la récolte la saveur piquante et poivrée de la roquette.
Et pour enrichir encore le goût, l'Aventy a joint le persil odorant :
L'ajout de la plante aromatique était un joli clin d’œil au giardinetto qui ornait la poupe du Zeph.
La salade offerte par l'Aventy reflétait la volonté de donner au souvenir une saveur exquise.
Bien sûr, la mâche, la roquette et le persil n'étaient plus recouverts du givre shakespearien ou proustien quand ils ont été cueillis.
Quand on se souvient de son ami, on se souvient de lui en toutes circonstances, dans la grisaille comme par beau temps.
La volonté organise la disponibilité, la prépare, et la fructifie.