Le bras gauche du Capitaine était à remettre en état.
Il fallait aussi restaurer notre confiance en chaque instant présent et en l'avenir.
Un disciple d'Ασκληπιός – AΣΚΛΗΠΙΟΣ (en français : Asklépios ou Esculape) s'y employait avec talent et dextérité : c'était le chirurgien qui avait ausculté le Capitaine au sujet du sésame pour le rapatriement par avion.
À l'homme de science, qui incarnait avec brio le savoir grec, le mousse a écrit ces mots de gratitude :
Γιατρέ,
Είμαι ο φίλος του Πιερ Κ. που φροντίζετε.
Έχετε πολύ επιδέξια χέρια και μια καρδιά γεμάτη καλοσύνη.
Είμαστε πολύ τυχεροί που είστε εσείς που φτιάχνετε το σπασμένο χέρι.
Το χιούμορ σας μας εντυπωσιάζει.
Όταν αποφάσισε να αναζητήσει θεραπεία στην Ελλάδα και όχι στη Γαλλία, ο Πιερ Κ. σας είπε : “ I hope you are a good doctor ! ”. Μακριά από το να προσβάλλεστε, γελάσατε.
Στη συνέχεια, όταν σας επέλεξε ο Πιερ Κ., είπε επίσης : “ I give my life to you ”. Γελάσατε πάλι.
Επειδή ο γύψος ήταν πολύ σφιχτός, ο Πιερ Κ. άρχισε να αφαιρέσει τον επίδεσμο. Δεν κάνατε κανένα όνειδος. Αντίθετα, κόψατε κομμάτια με το πριόνι για να ανακουφίσετε.
Έχετε πάντα κατανόηση για το άτομο που φροντίζετε.
Πριν φύγει από το νοσοκομείο, ο Πιερ Κ. ρώτησε αν όλα τα χαρτιά (συνταγή και αναφορές) ήταν έτοιμα. Απαντήσατε, αυτή τη φορά, ξεκάθαρα στα γαλλικά : “ Tout est fait ! ”
Σας είμαστε πολύ ευγνώμονες.
O Μιν (όπως στο όνομα “Χο Τσι Μιν”)
Docteur,
Je suis l'ami de Pierre C. que vous soignez.
Vous avez des mains très habiles et un cœur débordant de bonté.
Nous sommes très chanceux que ce soit vous qui réparez le bras cassé.
Votre sens de l'humour nous émerveille.
Au moment de décider de se faire soigner en Grèce et non en France, Pierre C. vous a dit : « J'espère que vous êtes un bon médecin ! ». Loin de vous vexer, vous avez ri.
Puis, quand Pierre C. vous a choisi, il a aussi dit : « Je vous confie ma vie ». Vous avez encore ri.
Parce que le plâtre serrait trop, Pierre C. a commencé à défaire le bandage. Vous n'avez fait aucun reproche. Au contraire, vous avez enlevé des morceaux à la scie pour apporter du soulagement.
Vous êtes toujours compréhensif à l'égard de la personne que vous soignez.
Avant de quitter l'hôpital, Pierre C. a demandé si tous les papiers (ordonnance et rapports) étaient prêts. Vous avez répondu, cette fois, clairement en français : « Tout est fait ! »
Nous vous sommes très reconnaissants.
Minh (comme dans le nom Hô chi Minh)
Sur la photo suivante, le chirurgien se trouvait à gauche :
Sur la droite, c'était l'anesthésiste, venu pour s'assurer qu'il y avait pas de contre-indication. Les questions qu'il posait au Capitaine étaient, bien sûr, d'ordre technique. Et il adoptait un ton feutré pour qu'elles ne paraissent pas intrusives.
Le courrier de remerciement ci-dessus louait la grande capacité d'écoute de la part du chirurgien et sa promptitude à prendre en compte ce que lui disait la personne qu'il soignait. Les premiers réajustements qu'il s'est empressé de réaliser concernait le plâtre, qui appuyait trop, par endroits, sur la chair endolorie. Voici le chirurgien en train d'enlever les bords qui blessaient :
Les endroits qui faisaient mal étaient patiemment délimités au feutre noir, puis l'excès de matière a été enlevé, avec minutie, à la scie.
Le chirurgien avait un adjoint qui s'occupait des préliminaires. Lors du troisième passage à l'hôpital, c'était l'adjoint qui nous a reçus dans un premier temps. C'était lui qui, au nom de son supérieur hiérarchique, établissait l'ordonnance pour les rayons X.
La radiographie s'est révélée très encourageante. Voici l'adjoint en train de préparer le nouveau pansement, juste après que son chef s'est réjoui que les os aient commencé à bien se souder :
L'adjoint réglait les questions de détail dans la mise en œuvre de la thérapie menée par son chef. L'adjoint émettait des suggestions, qui étaient bien accueillies par son supérieur, car elles étaient, toutes, sensées.
La convergence des points de vue et la complémentarité des champs de compétence induisaient chez la personne soignée une confiance accrue. L'harmonie, donnée en exemple, stimule la restauration de l'harmonie dans un corps souffrant.
Au Centre Médical d'Athènes, la sollicitude était présente à tous les échelons de l'équipe soignante.
Pour les questions d'ordre technique, et non pas d'ordre administratif, voici la station d'aiguillage :
C'était là qu'était prise la décision d'appeler tel ou tel médecin pour traiter le cas qui se présentait. C'était ce bureau de pilotage qui a pourvu au fauteuil roulant destiné à accueillir le Capitaine dès sa sortie du taxi qui l'avait amené vers le médecin habilité à délivrer le sésame pour le rapatriement par avion.
Une fois prise la décision de se faire soigner en Grèce, nous quittions la gestion des problèmes purement médicaux pour aborder celle des questions administratives. Le changement de registre demandait un changement de lieu et le déplacement du fauteuil roulant a été réalisé grâce à l'intervention d'un soignant dont la silhouette apparaissait à droite sur la photo précédente. L'homme s'acquittait de sa mission avec douceur et bonté. Puis, au moment de nous dire au revoir, il a pincé le Capitaine sur la joue, comme on l'aurait fait à un bébé parce qu'on le trouvait bien mignon et bien affectueux. Le geste du Grec était mû par sa conception tactile de la relation humaine. Mais le contact de l'épiderme avec l'épiderme exprimait aussi un profond désir d'apporter du réconfort.
La consolation utilisait encore l'humour. La soignante qui se trouvait à gauche sur la photo, parlait un peu français. Avec son accent chantant, et en se dandinant, elle se plaisait à nous dire : « Je suis aussi touriste ! » Son jeu théâtral nous amusait. Et le rire faisait oublier la peine. C'était la première thérapie. Il y en avait une seconde, sous-jacente à la première : loin de signifier une quelconque désinvolture, la parole du jeu scénique proclamait l'empathie. Et l'empathie chassait le sentiment de solitude face à l'adversité.
Par la parole et par le geste, toute l'équipe soignante du Centre Médical d'Athènes stimulait le mental et l'affectif pour obtenir un meilleur rétablissement de l'organisme. Cet art de restaurer le corps était un legs des Anciens.
L'hommage à l'Antiquité était manifeste dès le hall d'entrée.
Paisible, sereine et bienveillante, Ὑγίεια – ὙΓΙΕΙΑ (en français : Hygie), la déesse de la santé, présidait au déroulement harmonieux des processus de guérison :
Le serment qui définit l'engagement solennel du médecin commence par ces mots :
Ὄμνυμι Ἀπόλλωνα ἰητρὸν, καὶ Ἀσκληπιὸν, καὶ Ὑγείαν, καὶ Πανάκειαν, καὶ θεοὺς πάντας τε καὶ πάσας, ἵστορας ποιεύμενος, ἐπιτελέα ποιήσειν κατὰ δύναμιν καὶ κρίσιν ἐμὴν ὅρκον τόνδε καὶ ξυγγραφὴν τήνδε.
Je jure par Apollon médecin, par Asclépios, par Hygie et Panacée, par tous les dieux et toutes les déesses, les prenant à témoin, de remplir, selon ma capacité et mon jugement, ce serment et ce contrat.
Au milieu des fauteuils qui contribuaient à l'ambiance cossue du hall d'entrée, l'élégant profil de la déesse évoquait la portée pérenne du serment.
Une bonté qui traverse les siècles et qui franchit les frontières.
Le Centre Médical d'Athènes avait l'intelligence de faire bénéficier son savoir-faire à celles et ceux qui ne pratiquaient pas la langue d'Homère. L'accueil des visiteurs comportait un bureau spécialement dédié à l'international. Voici ce bureau, dont la mission était de venir en aide au non-Grecs :
Le décor, qui montrait de nombreux drapeaux, exhibait la vitrine polyglotte de ce service bien utile. Y travaillait un jeune Grec extrêmement dévoué. Pour nous aider à remplir les formalités d'admission dans le département de chirurgie, il est resté une heure de plus après son travail officiel.
Ce jour-là, qui était un vendredi, il s'apprêtait à prendre ses vacances à Καλαμάτα – ΚΑΛΑΜΑΤΑ (en français : Kalamata), grâce à un bus qui l'y amènerait depuis le Pirée. Nous lui avons dit que nous ne voulions pas le mettre en retard par rapport à son bus. Mais le Grec n'avait pas la conscience tranquille tant que sa mission de médiateur n'avait pas abouti à des résultats concrets et positifs.
Nous l'avons très chaleureusement remercié pour son « hospitalité », en grec : φιλοξενία – ΦΙΛΟΞΕΝΙΑ, littéralement : « amour de l'étranger ». La situation de l'instant illustrait parfaitement l'étymologie. Notre sincère gratitude a fait venir les larmes aux yeux du médiateur dévoué.
Concernant l'art de restaurer le soma comme dans tant d'autres domaines, le savoir grec a la vocation de l'universalité. Cette aspiration à l'universel se voit dans les actes et dans leur proclamation, scripturale ou iconographique. En rapport avec cet objectif, la décoration des murs était fort éloquente. Voici l'un des tableaux qui ornaient les couloirs du neuvième étage, où était soigné le Capitaine :
La colombe de la paix était tenue par une Grecque, reconnaissable à la chevelure.
Même style ourlé pour les sourcils et la bouche de la jeune fille, et aussi pour les plumes internes de l'oiseau chéri.
Par contre, l'environnement architectural ne montrait rien de grec, à dessein.
Car le tableau ne parlait pas de ce que la Grèce faisait pour elle-même, mais de ce qu'elle apportait au monde entier.
Le dôme pourrait évoquer le Panthéon à Rome. Le bâtiment juste à droite rappellerait un palais vénitien. De nombreuses arcades apparaissaient ici et là. Cependant l'arcade n'était pas un produit du classicisme grec, mais de la Rome antique.
Les édifices représentés appartenaient donc à la périphérie du cosmos grec. Ils s'apprêtaient à recevoir la visite de la colombe qui apporterait le rétablissement de l'harmonie.
Le but ultime de la restauration est la paix : celle du corps, de l'esprit et de l'être tout entier.
Le Centre Médical d'Athènes a la sagesse d'entreprendre la restauration de l'organisme en prenant en compte l'environnement humain de la personne soignée. Le contexte affectif a le grand pouvoir de dynamiser les ressources du corps. C'est pourquoi le Centre Médical d'Athènes autorisait la présence des proches tout au long de la journée, y compris la nuit.
Voici un coucher de soleil au Centre Médical d'Athènes :
À l'horizon, se trouvait le Village Olympique, qui était sorti de terre pour fêter le retour des JO dans la mère-patrie, en 2004. À gauche du feu rouge le plus à gauche, émergeait le sommet d'une arche illuminée, qui faisait partie des structures de prestige du Village Olympique.
C'est à la tombée de la nuit que très souvent le poids de l'esseulement commence à devenir insupportable, surtout quand il y a une épine dans la chair. La proximité d'une personne aimante est alors un grand réconfort. Grâce à cet art de soigner, hérité de l'Antiquité, le mousse était très heureux d'apporter sa contribution personnelle pour dissiper l'angoisse nocturne, qui pourrait assaillir l'alité.
Le Centre Médical d'Athènes affichait en grand sa devise sur la façade principale. Cette devise était : « Πάντα ένα βήμα μπρoστά ». Littéralement : Toujours un pas en avant.
Ne pas faire du surplace, mais avancer.
Rester modeste au sujet du progrès attendu, pour ne pas décourager autrui ou soi-même. Avancer d'un pas est déjà un motif de satisfaction. Il ne s'agit pas de limiter le nombre de pas en avant, mais de savoir se réjouir même lorsqu'un seul pas a été réalisé. Être à la fois positif et raisonnable. On reconnaît là la sagesse des Anciens.
Se fixer comme objectif la réussite de chaque instant. L'adverbe « toujours » ouvre la phrase en précisant l'enjeu, qui est d'ordre temporel. Ne jamais renoncer. Exhortation à la persévérance.
La faisabilité donne du courage et rétablit la confiance.
Le Centre Médical d'Athènes œuvre à la restauration de la paix sur le plan somatique tout comme sur le plan psychique.
La paix de l'esprit facilite le retour à la paix du corps, tout en en couronnant l'accomplissement.
Voici une photo du parking devant le Centre Médical d'Athènes :
Le Capitaine venait d'avoir en poche l'ordonnance qui prescrivait la vitamine C pour préserver la souplesse des articulations au niveau de la main.
Au sens figuré, il n'y avait pas de meilleure vitamine pour l'organisme que la bonté manifestée à tous les niveaux par l'équipe soignante.
La saison de la restauration a commencé sous les auspices les plus favorables.
Elle se poursuit de manière satisfaisante.